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Grandes tendances
de l’année littéraire 2015 en Chine :
le roman toujours en tête des ventes, recul de la nouvelle
courte, la nouvelle moyenne en pointe
par Brigitte Duzan, 23 décembre 2015, actualisé 12 mars 2022
Introduction
Cet article analyse les tendances de fond apparues dans la
littérature chinoise pendant l’année 2015 à partir d’entretiens
réalisés par des journalistes du Journal de la jeunesse de Pékin
avec des responsables de la rédaction de deux des principales
revues littéraires chinoises ainsi qu’avec des critiques
littéraires influents.
L’analyse est d’autant plus intéressante qu’elle fait état
d’opinions personnelles dont les recoupements sont
significatifs, et qu’elle est conduite selon les lignes des
trois principales formes spécifiques à la littérature chinoise,
dont elle donne une appréciation comparative pour 2015 : le
roman (changpianxiaoshuo
长篇小说),
la nouvelle dite moyenne (zhongpianxiaoshuo
中篇小说)
et la nouvelle courte (duanpianxiaoshuo
短篇小说).
L’année littéraire 2015 : grandes tendances
I.
L’opinion des revues
Si l’on veut expliquer au mieux la situation de la
création littéraire aujourd’hui en Chine, il faut
d’abord examiner les publications dans les revues
littéraires, étape préliminaire avant la publication
chez un éditeur. A cet égard, deux revues sont de
première importance : « Dangdai » (《当代》),
la revue du groupe « Littérature du peuple » (人民文学)
[créée en 1979], et « Shouhuo » ou Harvest (《收获》),
revue publiée sous l’égide de l’Association des
écrivains de Shanghai [créée en 1957]. On peut dire que
ce sont les deux grands bastions littéraires en Chine,
l’un au nord et l’autre au sud.
[La première partie du présent article a donc été
rédigée sur la base d’entretiens avec la directrice de
la rédaction de Dangdai, Kong Lingyan (孔令燕),
et la rédactrice en chef adjointe de Shouhuo,
Zhong
Hongming
(钟红明).] |
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Kong Lingyan |
2015 :
année médiocre ou grand millésime pour le roman ?
L’opinion de Kong Lingyan
Tao Yao (Zhang Zhe) |
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Selon Kong Lingyan, « tout le monde a les yeux rivés sur
le roman parce que c’est le domaine de l’édition qui est
le plus rentable économiquement. Mais cette année est
une année creuse, les bons produits ont été rares. » Les
titres que l’on peut citer sont rares, dit-elle : « Au
sommet des montagnes » (《群山之巅》)
de
Chi Zijian (迟子建),
« Fini la chanson » (《曲终人在》)
de
Zhou Daxin (周大新),
« Tao Yao » (《桃夭》)
de Zhang Zhe (张者),
plus le roman de
Wang
Anyi (王安忆)
paru début décembre dans la revue Shouhuo, avant
publication prévue pour début 2016 aux éditions
Littérature du peuple :
« Incognito » (《匿名》). On
compte les romans intéressants sur les doigts de la
main.
« Le roman de Chi Zijian est parmi les plus remarquables
de l’année, et il a aussi relativement bien marché en
termes de ventes. Comme les romans précédents de cette
romancière d’un genre traditionnel, celui-ci est à la
fois |
nouveau,
profond, et agréable à lire, ce qui n’est pas facile à faire.
[…] »
L’opinion de Zhong Hongming
Pour la rédactrice en chef adjointe de Shouhuo,
au contraire, l’année 2015 peut être considérée comme
« une grande année de création ». « En 2015, Shouhuo
a publié six numéros bimensuels, dont deux consacrés
à la publication d’un roman. Dans l’édition, quand on
parle d’années de vaches maigres ou de grands
millésimes, c’est surtout en fonction des romans. »
Parmi les romans publiés dans Shouhuo en 2015, à
côté de ceux de
Chi Zijian et
Wang Anyi, Zhong
Hongming a particulièrement aimé celui de
Lu Nei (路内)
« Compassion » (《慈悲》).
« Certains disent que les écrivains "post ’70",
jusqu’ici, n’ont pas réussi à percer parce qu’ils n’ont
publié que des nouvelles, courtes et moyennes, pas de
romans. Mais, ces deux dernières années, cela a changé :
Xu Zechen (徐则臣)
a publié « Jérusalem » (《耶路撒冷》),
en 2014, et Tian Er (田耳)
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Incognito (Wang Anyi) |
« Corps célestes en suspension » (《天体悬浮》),
en 2013. … »
Zhong Hongming |
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Quant à
Wang Anyi, son roman a
été publié dans le double numéro mai-juin de Shouhuo
et Zhong Hongming, qui a été l’une des premières
personnes à le lire, le décrit comme une œuvre « d’un
caractère fortement expérimental, allant même jusqu’à
des extrêmes. »
Wang Anyi est un écrivain que Zhong Hongming admire
énormément : « Depuis le début des années 1980, elle a
toujours gardé un excellent niveau d’écriture et
d’expression esthétique, sans jamais cesser
d’expérimenter. … Dans ce dernier roman, on peut dire
qu’elle part d’une réflexion sur l’existence
individuelle pour aller vers la nature de l’homme et du
monde, en ouvrant une brèche dans la civilisation
urbaine … »
Zhong Hongming a compté le nombre de fois que des
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œuvres
de Wang Anyi ont été publiées dans Shouhuo :
trente-quatre fois. Ces dernières années, la revue a publié
plusieurs romans d’elle: « Fuping » (《富萍》),
« Un âge des lumières » (《启蒙时代》),
et « Senteurs célestes » (《天香》).
Mais Zhong Hongming a noté un net changement avec
« Incognito » : « la construction du roman est différente ; la
vie du personnage dans la forêt ne change pas, mais ses idées
sont en perpétuel mouvement. L’accent est sur la pensée, c’est
une écriture bien plus abstraite qu’auparavant, reflétant une
pensée complexe alors que l’intrigue elle-même a peu
d’importance. »
Peu d’intérêt pour les nouvelles
L’opinion de Kong Lingyan
Kong Lingyan regrette que les nouvelles, courtes ou
moyennes, n’attirent pas l’intérêt du public comme elles
le mériteraient, le résultat étant qu’elles sont une
affaire de spécialistes, surtout lues dans les cercles
littéraires. Aujourd’hui aucun auteur ne devient célèbre
en écrivant des nouvelles, en |
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Shi Yifeng |
revanche les
revues en vivent. En fait, dit-elle, en termes de qualité
littéraire, la nouvelle est d’un
Jing Yongming |
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niveau bien
supérieur au roman…
Parmi les meilleures nouvelles de l’année 2015, elle en
recommande particulièrement deux, deux zhongpian
d’un auteur "post ’70" du Henan,
Li Qingyuan (李清源) :
« La rédemption de Su Rang » et « Contents de se voir » (《苏让的救赎》/《相见欢》).
Ce sont des récits très bien écrits, modernes sans être
artificiels…
Deux autres nouvelles, également moyennes, qui lui ont
laissé une très bonne impression sont l’une de
Shi
Yifeng (石一枫),
« Les yeux de la terre » (《地球之眼》),
et l’autre de
Jing Yongming (荆永鸣),
« Compétition » (《较量》),
parue dans le numéro dix de la revue Littérature du
peuple et primée par la revue. |
L’opinion de Zhong Hongming
Quant à Zhong Hongming, dans le registre de la nouvelle
moyenne, elle a bien aimé « Le Moïse de la plaine » (《平原上的摩西》)
de
Shuang
Xuetao (双雪涛)
parue dans le second numéro de Shouhuo en 2015.
Il s’agit d’un auteur post ’80 dont la nouvelle est un
condensé de points de vue de divers personnages, sur une
période d’un demi-siècle : « A la base, c’est une
histoire à suspense de meurtres en chaîne. Mais, en
fait, c’est un prétexte à satire sociale acérée. Chaque
destin est une lutte entre la vie et la mort, chacun
porte au cœur une blessure, mais la recherche d’une
rédemption spirituelle est aléatoire. »
Réflexions générales
Peu d’avancées stylistiques |
|
Shuang Xuetao |
Selon Kong Lingyan, une grande partie des romans ont pour thème
la réalité quotidienne, l’environnement de la vie de chacun, les
difficultés des jeunes et les crises de l’âge mur, ainsi que les
problèmes de corruption. « Il est frappant de voir, depuis
plusieurs années, se développer des sujets sur des thèmes
offerts par l’actualité, ce qui peut s’expliquer, car lecteurs
et auteurs sont immergés dans un même univers lié au cinéma, qui
met la vie en scène ; les écrivains utilisent ces mêmes sujets,
d’une autre manière. »
Pour ce qui est du style, de la technique, il y a peu de
recherche aujourd’hui. Chez les auteurs post ’80, il y a un
désir de faire des expériences sur la forme, et cela entraîne
des styles très divers. Il semble qu’il y ait aujourd’hui un
intense besoin d’expression, mais pas dans n’importe quel sens.
En fait la tendance générale est d’expérimenter essentiellement
sur la forme narrative. ».
D’un autre côté, on en revient toujours aux formes classiques,
c’est une constante. Il est possible que ce phénomène soit lié
aux attentes des lecteurs : « Les lecteurs veulent lire des
histoires, mais la forme utilisée pour les raconter ne les
intéresse pas. La recherche sur la forme, finalement, est
forcément limitée aux cercles littéraires, aux initiés. »
Rares œuvres de qualité, mais nombreux prix
Si les prix décernés sont de plus en plus nombreux,
selon Kong Lingyan,
les œuvres de
qualité, en revanche, sont relativement rares.
Ce qui a donné un sang
neuf aux revues littéraires, c’est la libéralisation de
l’économie des années 1990, l’ouverture au marché. Mais, depuis
2012-2013, la situation n’avait pas changé notablement. Or,
cette année, on a senti une certaine reprise. Il est possible,
selon elle, que les raisons de cette amélioration soient à
rechercher dans une retombée du prix Nobel attribué à
Mo Yan,
ou dans le fait que les lecteurs de littérature pour les jeunes
ont vieilli, et qu’il leur faut donc des lectures plus mûres. On
n’a pas trouvé de raisons concrètes à cette reprise, c’est
simplement une analyse personnelle et le sentiment du marché et
de la société.
35ème anniversaire de Dangdai,
prix décernés par le directeur général (à
g.) à :
(de g. à dr.) Jia Pingwa, Liu Xinwu,
Tie Ning et Wang Meng |
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En début d’année, Dangdai a fêté le 35ème
anniversaire de sa création ; l’an prochain, en début
d’année aussi, aura lieu le « forum annuel du roman de
Dangdai » (“当代·长篇小说年度论坛”)
qui élira « le meilleur roman de l’année 2015 » ainsi
que les cinq meilleurs. Depuis plus de dix ans, ce forum
attribue des prix avec pour slogan : « zéro récompense
financière, totale transparence ». Ce sont des prix qui
ont une forte notoriété dans la profession. Il s’agit de
distinguer les meilleurs romans de l’année, sans
bénéfice ni préjudice, en permettant aux lecteurs comme |
aux critiques d’exprimer
leur opinion, fondée sur leur propre perception des œuvres.
Pourtant, l’impact n’est pas très important, sans doute,
justement, parce qu’il n’y a pas de dotation financière.
Kong Lingyan a d’ailleurs quelques réserves concernant les prix
littéraires. « En 2004, quand Dangdai a lancé le sien, il
n’y avait pas encore beaucoup de manifestations de ce genre.
Aujourd’hui, les forums littéraires, remises de prix et lectures
d’œuvres se sont multipliés, en revanche les œuvres elles-mêmes
sont relativement peu nombreuses. Or, les médias, les maisons
d’édition, tous ont leur prix, chacun cherchant à attirer le
lecteur. Parfois, dit Kong Lingyan, la faible qualité des livres
sélectionnés m’inquiète un peu.
II.
L’opinion des critiques
[La seconde partie de l’article rapporte la teneur des
entretiens avec deux des plus influents critiques littéraires en
Chine aujourd’hui :
- d’une part
Li Yunlei
(李云雷),
critique et chercheur très influent, diplômé de Beida,
spécialiste de littérature et culture chinoise contemporaine,
rédacteur de la revue Théorie et critique de la littérature et
des arts Wenxue
lilun yu piping
(《文艺理论与批评》),
fondateur en 2003 du site web zuo’an
wenhua wang
(左岸文化网)
ou « site de littérature de la rive gauche »
.
- d’autre part Meng Fanhua (孟繁华),
autre influent critique littéraire, professeur à l’Université
normale de Shenyang, vice-président de l’Association de
littérature chinoise contemporaine, auteur de nombreux ouvrages
sur le sujet et éditeur de recueils de nouvelles, moyennes et
courtes.]
L’opinion de Li Yunlei
Le critique Li Yunlei (李云雷)
a exprimé une opinion relativement optimiste sur
l’évolution de la littérature chinoise en 2015 : selon
lui, les écrivains chinois cherchent actuellement à
traduire les diverses facettes de l’époque actuelle, en
partant, pour l’explorer, des ressources offertes par la
Chine elle-même [hors influence extérieure] ; il voit
ainsi se dessiner dans la littérature contemporaine des
schémas inédits et une atmosphère nouvelle.
Parmi les titres les plus marquants de cette année, il
relève lui aussi « Les yeux de la terre » (《地球之眼》)
de
Shi Yifeng (石一枫)
et « Fini la chanson » (《曲终人在》)
de
Zhou Daxin (周大新).
Mais il cite également « Histoire des sons » (《声音史》)
de Luo
Weizhang (罗伟章)
, « Destin
usurpé » (《篡改的命》)
de
Dong Xi (东西)
ou encore « Parmi les vivants » (《活着之上》)
de Yan Zhen (阎真).
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Histoire des sons (Luo Weizhang)
dans Octobre (2015 n°1) |
Destin usurpé (Dong Xi) |
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D’une façon générale, l’impression dominante qu’il en
retire est que les auteurs s’efforcent de rendre compte
de la complexité de la vie en Chine en en explorant les
diverses tendances dans une optique réaliste, offrant
ainsi une réflexion et un jugement sur la Chine
contemporaine qui permettent en même temps de la
dépasser.
Par le biais des tribulations de deux jeunes gens, « Les
yeux de la terre » offre une peinture contrastée de
la vie de jeunes Chinois d’aujourd’hui appartenant à des
couches sociales différentes, et une vision élargie des
problèmes existentiels qui se posent à eux dans un
contexte mondialisé.
« Histoire des sons » est une élégie rurale de la
Chine contemporaine qui traite des bouleversements
sociaux à travers la sensibilité aux « sons » du
personnage principal ; un village a disparu, mais les
« sons » qui lui étaient propres ne cessent de revenir à
la mémoire du personnage ; c’est à la fois une
invocation aux esprits |
et un dernier adieu, teintés de la nostalgie du passé.
« Destin usurpé » décrit l’histoire de paysans
partis à la ville sur trois générations, narration
simple, mais très riche, montrant l’esprit de résilience
du peuple chinois, mais avec une complexité accrue dans
le contexte contemporain.
« Fini la chanson » relève du genre classique des
"romans sur les mandarins" (“官场小说”),
mais dépasse ce cadre pour montrer la complexité du
monde des hauts fonctionnaires chinois d’aujourd’hui en
s’appuyant sur la vie quotidienne du personnage
principal et sa carrière.
« Parmi les vivants » est un portrait des
intellectuels modernes et de leurs problèmes, leurs
luttes et leurs doutes, qui sont aussi celles de tout un
chacun…
Pour Li Yunlei, la création littéraire traverse une
étape intéressante, marquée par un changement à deux
niveaux : d’une part, la littérature chinoise est en
train d’abandonner les références à l’Occident, pour se
tourner |
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Fini la chanson (Zhou Daxin) |
Parmi les vivants (Yan Zhen) |
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vers des sources nationales, y compris les sources très
riches de la tradition et
de l’histoire ; d’autre part, sur cette base, les
auteurs explorent des formes d’expression qui ne peuvent
plus être des formes narratives simples, mais doivent
être fondées sur la vie et l’expérience propres à la
Chine, pour traduire les changements du monde actuel
dans ses multiples aspects, en termes relationnels,
artistiques et historiques.
Le but des auteurs actuels est d’expliquer ce que nous
sommes en train de vivre, qui est totalement inédit, et,
pense Li Yunlei, leurs efforts sont dignes de
considération, pour ce qu’ils apportent de nouveau, en
termes de style aussi bien que de ton.
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L’opinion de Meng Fanhua
Editeur depuis de nombreuses années de sélections de
nouvelles, Meng Fanhua résume la situation de la
littérature chinoise actuelle en en contrastant les
différentes catégories :
“长篇不错,中篇优秀,短篇糟糕”
« Le roman ne s’en sort pas trop mal,
la nouvelle moyenne est au mieux de
sa
forme,
la nouvelle courte traverse une
mauvais
passe. »
Le roman : pas mal |
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Meng Fanhua |
Décors de scène (Chen Yan) |
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Le roman ne s’en sort pas mal, dit-il. Il cite pour
exemple « Décors de scène » (《装台》)
de
Chen Yan (陈彦),
qu’il considère comme l’un des meilleurs romans de
l’année. Ecrivain du Shaanxi, dramaturge et librettiste,
spécialiste de l’opéra qinqiang (秦腔),
opéra populaire du nord-ouest de la Chine
,
Chen Yan a écrit beaucoup de livrets qui ont souvent été
primés. « Décors de scène » raconte l’étape finale d’une
production artistique, en décrivant les différentes
personnes concernées, de tous niveaux et professions. A
partir de ce groupe de basse extraction sociale,
explique Meng Fanhua, l’auteur parvient à donner une
impression de vacuité comme celle qui ressort de la
lecture du « Rêve dans le Pavillon rouge »…..
Parmi les romans à retenir, Meng Fanhua retient
également ceux déjà cités de
Dong Xi,
Chi Zijian
et
Zhou Daxin, mais
aussi, pour sa qualité d’écriture, celui de Cai Xiaohang
(蔡晓航),
« L’ère de la pollution sonore » (《被声音打扰的时光》). |
La nouvelle moyenne mieux que jamais
Cependant, il considère que, au cours des cent dernières
années, en Chine, la nouvelle moyenne a été bien
supérieure au roman ou à la nouvelle courte. C’est « La
véritable histoire d’AQ » qui a lancé le mouvement de la
nouvelle littérature, mais c’est bien sûr après la chute
de la Bande des quatre que la nouvelle moyenne a connu
un développement particulièrement important, avec, dans
toutes les provinces, la création d’une foule de revues
littéraires essentielles pour leur diffusion. En effet,
la nouvelle moyenne est difficile à commercialiser ;
mais, que ce soit les auteurs ou les éditeurs de revues,
tous sont très exigeants envers ce genre de nouvelles,
elles ont donc tendance à être d’une grande qualité.
L’année 2015 en est une preuve : il y a eu d’excellentes
nouvelles moyennes. Son premier exemple est d’emblée « Meizi
et Qia
Kebai »
(《梅子与恰可拜》)
de Dong Libo (董立勃),
publiée dans le 1er numéro de 2015 du Mensuel
de |
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Compétition (Jing Yongming)
dans Renmin wenxue |
fiction (《小说月报》).
Comme beaucoup des histoires de cet écrivain, celle-ci se passe
au Xinjiang, où il la vit ; elle raconte, sur fond de Révolution
culturelle, l’idylle et le mariage d’une jeune intellectuelle
Meng Fanhua remettant le prix
Renmin wenxue
2015 à Jing Yongming |
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et d’un étudiant ; après l’arrestation de l’étudiant, un
descendant de tribus tujue nommé Qia Kebai prend
soin d’elle. Meng Fanhua trouve que, dans les nouvelles
actuelles, les sentiments ne sont pas très bien décrits,
mais celle-ci, au contraire, a une saveur d’ancien
classique, et l’histoire est émouvante.
Parmi les nouvelles qu’il trouve bien écrites, il cite
lui aussi « Les yeux de la terre » de
Shi
Yifeng,
et « Compétition »,
de Jing Yongming.
Mais il ajoute « Deux ou trois choses vers le
nord-nord-ouest »
(《西北偏北之二三》)
de la romancière |
Lin Bai (林白),
parue en juillet, dans le numéro quatre de Shouhuo.
La nouvelle courte en panne
Cette année, en revanche, toujours selon Meng Fanhua, il n’y a
pas eu de bonnes nouvelles courtes. Il a intitulé l’introduction
qu’il a écrite pour le recueil de sa sélection des meilleures
nouvelles de l’année « La crise de sympathie de notre époque » (“我们这个时代的情义危机”),
crise de tendresse et de chaleur humaine, liée à une crise du
sens de la justice.
La nouvelle courte est entrée dans une telle période, dénuée de
sentiment et de chaleur. Les récits expriment des tendances au
doute, à la froideur, la désolation, ou la distance née de la
méfiance. Meng Fanhua se dit préoccupé. Il est certain qu’il ya
une tendance de ce genre dans la vie actuelle, reconnaît-il,
mais ce n’est pas général et il n’y a pas que cela. On peut
comprendre que quelques écrivains écrivent des nouvelles de la
sorte, mais par tous. … Il espère donc que cette situation va
changer.
Récapitulatif des œuvres et auteurs cités
Romans
Au sommet des montagnes 《群山之巅》
Chi Zijian
迟子建
Fini la chanson
《曲终人在》
Zhou Daxin
周大新
Tao Yao 《桃夭》
Zhang
Zhe
张者
Incognito
《匿名》
Wang
Anyi
王安忆
Compassion
《慈悲》
Lu Nei
路内
Jérusalem
《耶路撒冷》
Xu
Zechen
徐则臣
Corps célestes en suspension
《天体悬浮》
Tian Er
田耳
Destin usurpé 《篡改的命》
Dong
Xi 东西
Parmi les vivants 《活着之上》
Yan Zhen
阎真
Décors de scène 《装台》
Chen Yan
陈彦
L’ère de la pollution sonore
《被声音打扰的时光》
Cai Xiaohang
蔡晓航
Nouvelles moyennes
La rédemption de Su Rang
《苏让的救赎》
Li Qingyuan
李清源
Contents de se voir 《相见欢》
id.
Les yeux de la terre 《地球之眼》
Shi
Yifeng
石一枫
Compétition
《较量》
Jing Yongming
荆永鸣
Le Moïse de la plaine 《平原上的摩西》
Shuang
Xuetao
双雪涛
Histoire des sons 《声音史》
Luo
Weizhang
罗伟章
Meizi et QiaKebai 《梅子与恰可拜》
Dong Libo
董立勃
Deux ou trois choses vers le nord-nord-ouest 《西北偏北之二三》
Lin Bai 林白
Traduction annotée et commentée d’un article
initialement publié dans le Journal de la jeunesse de
Pékin (北京青年报) et repris sur le site ifeng, le 18
décembre 2015 :
2015 中国文学综述:面对现实 技术止步 短篇糟糕
Résumé de l’année littéraire 2015 : réalisme avant tout,
pause stylistique et recul de la nouvelle courte.
(texte original :
http://culture.ifeng.com/a/20151218/46727909_0.shtml)
Les intertitres ont été rajoutés pour plus de clarté.
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