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Janvier 2011 : deuxièmes rencontres littéraires franco-chinoises à Pékin

par Brigitte Duzan, 30 janvier 2011

   

Pendant deux jours, les 21 et 22 janvier, huit personnalités du monde littéraire français, dont quatre écrivains (1), sont venues à Pékin rencontrer douze de leurs homologues chinois (2) : écrivains, éditeurs, traducteurs et spécialistes ont ainsi pu débattre des problèmes auxquels doit faire face la littérature aujourd’hui, dans un pays comme dans l’autre, en tentant de les aborder avec un « regard nouveau », thème général des débats (中国法国新眼光”).

    

Ces deuxièmes rencontres littéraires franco-chinoises (第二届中法文学论坛) ont eu lieu dans un endroit emblématique : le musée national de la Littérature chinoise moderne (中国现代文学馆). Ouvertes au public, et faisant suite à celles qui s’étaient déroulées à Paris en novembre 2009, elles étaient placées, côté chinois, sous l’égide de la présidente de l’Association nationale des écrivains chinois, Tie Ning (铁凝), et côté français, sous celle du conseiller culturel de l’Ambassade de France, Anthony Chaumuzeau.

 

    

Le musée de la littérature chinoise moderne

 

Dans son allocution introductive (3), la présidente Tie Ning a comparé la littérature à des fleurs : comme il y a, pour les fleurs, ceux qui les plantent et ceux qui les vendent à la criée au marché, en essayant d’en tirer le plus d’argent possible, il y a en littérature, a-t-elle dit, des écrivains qui sèment et d’autres qui se contentent d’écrire vite pour une vente rapide. Les uns n’aiment pas les fleurs, les autres se moquent de la littérature, et le problème est qu’ils risquent de faire fuir les lecteurs. Il faut donc cultiver l’amour des belles lettres, et ces rencontres

étaient une façon de le cultiver et de l’approfondir en commun, étant donné que des problèmes similaires se posent dans les deux pays.

   

Les questions abordées ont concerné la place de la lecture, de la littérature et de

l’écrivain dans le monde moderne, le rôle de la poésie dans ce monde, et, comme il y a deux ans déjà, la place, ambivalente, du numérique dans celui de la littérature et de l’édition. Un autre sujet à

l’ordre du jour était celui de la traduction et des problèmes 

 

Les participants, français et chinois

de compréhension qu’elle comporte, présenté et animé par deux spécialistes de la question : Liu Yan (刘焰), traductrice, entre autres, d’un recueil de nouvelles de Tie Ning paru aux éditions Bleu de Chine, et Sylvie Gentil, qui a reçu le prix de traduction Amédée Pichot en novembre 2010 pour sa traduction de « Bons baisers de Lénine » de Yan Lianke.

   

Tie Ning avec Annick Geille à sa droite, He Xiangyang (à gauche sur la photo) et Fang Fang (à droite)

 

C’est peut-être le rôle du féminisme dans

l’avant-garde littéraire et l’émergence de nouveaux talents qui a suscité  les interventions les plus personnelles et vivantes. La première intervenante sur ce sujet était Annick Geille, ancienne amie et biographe de Françoise Sagan à laquelle elle a consacré plus de trois cents pages de souvenirs et réflexions : « Un amour de Sagan ». Elle a souligné l’importance de Sagan à son époque : par sa vie autant que par ses écrits, elle a donné l’exemple d’une femme insoumise qui a contribué à élargir 

le champ de la liberté individuelle, pour les femmes, mais pas seulement. Annick Geille a également rappelé qu’il n’y a pas de différence de sexe en littérature, il y a simplement de bons écrivains, et des mauvais.

   

Ce qu’on pourrait appeler le « modèle Sagan » s’est révélé être toujours d’actualité lorsqu’on a entendu Fang Fang se demander quelle devait être l’attitude de la femme écrivain : soumission ou révolte. En Chine, a-t-elle dit, malgré une « libération » en trois étapes, la femme n’a toujours pas gagné une totale autonomie, et cela reste un des sujets de réflexion les plus profonds. Et, comme toujours, cela traduit un problème social bien plus général que la littérature est le mieux à même d’appréhender.

    

    *

   
Comme il y a deux ans, ces rencontres sont pour nous l’occasion de présenter des auteurs chinois pour la plupart peu connus en France : Fang Fang (
方方), Liu Qingbang (刘庆邦), Zhang Wei (张炜) et Li Er (李洱). Nous terminerons par un dossier sur Bi Feiyu (毕飞宇).
   

Notes

(1) Ces écrivains étaient Marie Nimier, Annick Geille, Gérard Macé et Philippe Nemo ; étaient également présents côté français, outre les traductrices Liu Yan et Sylvie Gentil, Hervé Serry, chargé de recherche au CNRS, spécialiste de la sociologie de la production culturelle, et Geneviève Imbot-Bichet, aujourd’hui directrice de collection chez Gallimard.

(2) Outre Jiang Yun (蒋韵), Liu Zhenyun (刘震云) et Xu Kun (徐坤), qui étaient déjà aux rencontres de Paris en 2009, participaient à ces rencontres les écrivains Fang Fang (方方), Bi Feiyu (毕飞宇), Liu Qingbang (刘庆邦), Zhang Wei (张炜), Li Er (李洱) et Guo Xuebo (郭雪波), le critique littéraire Li Jingze (李敬泽), le directeur adjoint du musée de la Littérature contemporaine et de l’Association de recherches pour le roman de Chine Wu Yiqin (吴义勤), ainsi que deux chercheurs : He Xiangyang (何向阳), directrice adjointe du Département de recherches en création littéraire de l’Association des Écrivains de Chine, membre du Comité de critique théorique de Chine et directeur adjoint de l’Association de recherche pour le roman de Chine et Ji Hongzhen (季红真), professeur à l’Institut de la Culture et de la Littérature chinoise de l’École normale supérieure de Shenyang après avoir été pendant vingt ans membre du département de recherche en création littéraire de l’Association des écrivains de Chine.
(3) Intitulée « Les fleurs aussi se vendent à la criée » (
“花盆也喧嚣”)
    

    

         

 

 

 

 

     

 

 

 

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