Wong Bik-wan
(ou Huang Biyun
黄碧云) est née en
1961 à Hong Kong.
On en a fait
une allégorie nationale, emblème d’une culture hybride à
la fois coloniale et américanisée, emblème aussi
d’une écriture
féminine et par là même subversive, dépassant les
modèles auxquels on la compare couramment,
Zhang Ailing et
Wang Anyi, dans
un postmodernisme postcolonial. Wong Bik-wan, vous
l’aurez compris, est classée parmi
l’avant-garde
littéraire.
Elle est
aujourd’hui très populaire, à Hong Kong et Taiwan et
jusqu’en Chine continentale, où sa nouvelle « L’hôtel du
dernier jour » (《末日酒店》)
a récemment été l’un des
Il flotte un flou
sciemment entretenu sur la vie de Wong Bik-wan. Son œuvre
elle-même nous en apprend plus sur elle que les quelques lignes
dont nous gratifient la plupart de ses biographes. Il est, en
revanche, essentiel de comprendre le cadre historique dans
lequel elle a commencé à écrire pour bien saisir la genèse de
son œuvre autant que sa portée.
Biographie succincte
On ne sait pas
grand-chose de Wong Bik-wan, ses biographies courantes se
réduisent à quelques lignes. Elle a fait des études de
journalisme à l’université chinoise de Hong Kong (香港中文大学新闻系),
a également un master de criminologie (香港大学社会学系犯罪学硕士),
mais a aussi
étudié la langue et la culture françaises à l’université Paris 1
(la Sorbonne). Elle a ensuite travaillé comme reporter et
scénariste (pour la télévision), avant de devenir journaliste
freelance.
Elle a beaucoup voyagé
à partir de 1987, visitant la France et l’Amérique latine, la
Yougoslavie et le Kosovo, le Vietnam et le Cambodge, et y
trouvant l’inspiration pour écrire articles et essais.
Wong Bik-wan présentant « Après »《其后》
Son premier
livre publié date de 1991 : c’est un recueil de huit
nouvelles intitulé « Après » (《其
后》).
Quatre ans plus tard, en 1994, sa nouvelle « Tendresse
et violence » (《温柔与暴烈》)
était couronnée du Hong Kong
Biennial Award for Chinese Literature, catégorie
fiction, suivi en 1996 du même prix, mais dans le
catégorie essais, pour le recueil « On est très bien
ainsi » (《我们如此很好》).
Mais elle n’était
encore qu’un écrivain « d’avant-garde » qui effrayait le public
et dont les livres se vendaient à quelque deux mille
exemplaires. Aujourd’hui, son style corrosif et ses histoires
impitoyables déclenchent les passions à chaque nouvelle
parution; elle a ses cercles de fans inconditionnels, à Hong
Kong et à Taiwan.
Elle continue par
ailleurs son activité de journaliste, au Hong Kong Standard (香港虎报),
tout en étant assistante d’un membre du Congrès.
Contexte historique
Ses œuvres ne peuvent
se comprendre qu’une fois rappelé le contexte particulier dans
lequel elles ont été écrites.
Signature du traité de Nankin
Par le traité de
Nankin, Hong Kong fut cédé en août 1842 au Royaume uni, devenant
ainsi colonie britannique. Mettant fin à la guerre de l’opium,
en octobre 1860, la convention de Pékin octroya ensuite à la
Grande Bretagne un bail perpétuel sur la péninsule de Kowloon.
Mais, afin de mieux en assurer sa défense, la Grande Bretagne
conclut en 1898 un bail de 99 ans pour s’assurer également la
contrôle des Nouveaux Territoires, bail expirant le 30 juin
1997.
Après 1949, la
« colonie » devint un asile pour les Chinois du continent,
accueillant des vagues successives de réfugiés, ainsi que leurs
capitaux. Dès mars 1972, le représentant permanent de la
République populaire à l’ONU envoya une lettre au comité de
décolonisation pour affirmer que Hong Kong et Macao n’entraient
pas dans la catégorie des prétendues « colonies » mais faisaient
partie du territoire chinois occupé par la Grande Bretagne et le
Portugal. Les négociations menées à partir de 1982 aboutirent le
19 décembre 1984 à la déclaration commune sino-britannique qui
prévoyait que Hong Kong cesserait d'être une colonie britannique
le 1er juillet 1997 et serait dorénavant une Région
administrative spéciale de la RPC.
Reconnaissant que le
territoire, avec son économie libérale, ne pouvait être assimilé
brutalement au sein de la Chine, Deng Xiaoping préconisa une
approche pragmatique, et il fut affirmé que Hong Kong serait
géré selon le principe « un pays, deux systèmes » ("一国两制",
c’est-à-dire 一个国家,两种制度).
Il n’empêche que
l’annonce de la déclaration provoqua inquiétude et opposition
dans la population, et une première vague d’émigration. Les
événements de Tian’anmen, en mai-juin 1989, contribuèrent à
renforcer la méfiance et les craintes, et entraînèrent une
deuxième vague d’émigration.
L’incertitude quant à
l’avenir suscita un climat délétère, et c’est ce climat sombre
et désespéré, doublé
d’une nostalgie du
passé, qui se reflète dans les nouvelles de Wong Bik-wan comme
dans les œuvres de ses contemporains, romanciers et cinéastes :
une atmosphère fin de siècle, à l’opposé de l’image de havre
financier et paradis économique habituellement associé à Hong
Kong, renforcée encore par la crise économique qui se déclencha
quelques mois après la rétrocession.
Comme l’a dit l’un de
ses biographes, Wong Bik-wan a créé :
一种残酷的黑色写作,反映了香港“幻灭的一代”的“世纪病”
une œuvre noire,
cruelle pourrait-on dire, réfléchissant la « maladie du siècle »
de « la génération de la désillusion » hongkongaise.
Une œuvre sombre
et subversive
Dès 1991, la
nouvelle « Après » (《其后》)
donne le ton : écrite à la première personne, elle
décrit les réflexions d’un homme atteint d’un cancer,
arrivé au terme de son existence et jetant un regard
rétrospectif sur elle. On partage ses regrets, une
certaine sérénité, aussi : toutes les souffrances
disparaissent « après »… A la fin de la nouvelle, il
revoit sa vie en un éclair, une vie passée si vite qu’il
a l’impression d’un rêve, rappelant Zhuangzi :
我会发觉我原来是一只蝴蝶,很偶然的,经过了生。
Je
vais peut-être réaliser que j’étais un papillon,
parcourant l’existence tout à fait par hasard.
Mais c’est
« La ville perdue » qui est vraiment le reflet du
siècle. C’est sans doute aussi l’une des œuvres les plus
représentatives de Wong Bik-wan.
La ville
perdue
« La ville
perdue » (《失城》)est une
allégorie de la Hong
Après 《其后》
Kong de la
rétrocession. Elle est typique du style et du ton de l’auteur :
un style procédant par touches allusives, ne dévoilant le sens
que peu à peu, et un ton froid, sans une once de sentiment,
posant dès
l’abord la mort comme
l’un des faits inéluctables de l’existence avec lequel il s’agit
de vivre :
人不得不流血、死亡… on
ne peut pas ne pas verser du sang, mourir...
« La ville perdue »
(《失城》)
L’architecte
Chen Luyuan (陈路远)
et
l’infirmière
Zhao Mei (赵眉)ont émigré en Amérique
du Nord où ils ont trouvé une certaine prospérité
matérielle, mais la perte de leurs racines se traduit au
jour le jour par une certaine aphasie. Zhao Mei tombe
même dans une dépression se traduisant par des
comportements pathologiques, voilant les fenêtres de
tentures noires et forçant ses enfants à ingurgiter de
la viande crue, avec des soupçons de cannibalisme
rappelant
Lu Xun.
Quand ils finissent
par revenir à Hong Kong, les retrouvailles sont difficiles :
tout a tellement changé en quelques années qu’ils sont obsolètes
dans une ville qui n’est plus la leur. Leur rêve d’émigration
s’est fracassé, leur rêve de retour aussi. Il n’y a pas de
paradis possible :
所谓理想和成就只不过是幻影而已
Ce qu’on appelle
idéal et réussite ne sont que des illusions, pas plus.
Tout ceci, cependant,
est raconté en flash back après une partie introductive glaçante
et sanglante à la Tarantino qui laisse pantois. Le narrateur
expose en tronçons de phrases brèves, comme découpées au
scalpel, sa vie tranquille, dans un petite maison de banlieue où
il a planté un manguier, et le « commerce de mort » (死人生意) qui les fait vivre, lui et sa femme, lui ambulancier de nuit, elle
fabriquant des linceuls pour les morts ; quatre alinéas où
dominent, répétés, le mot « mort » (死) et
l’expression « c’est inéluctable », « il ne peut qu’en être ainsi » (不得不如此).
Et puis un jour aménage
à côté de chez eux une famille de quatre enfants. Quatre enfants
maigres comme des chats (4个瘦小如猫的小孩)
apportant avec eux, au milieu d’un bric-à-brac pauvrissime, une
cage de rotin contenant une souris blanche. Une famille
famélique, tranquille : le narrateur ne voit guère le père que
de temps à autre en rentrant du travail, juste avant l’aube, à
peine le temps d’apercevoir des dents blanches dans un grand
sourire disparaissant très vite dans la nuit, comme dans un
rêve.
Et la vie continue,
jusqu’à ce que, une aube tout aussi tranquille que les autres,
l’homme vienne frapper à la porte du narrateur ; il se présente,
je m’appelle Chen Luyuan et j’habite à côté … A une invitation à
prendre une tasse de café, il répond : désolé de vous déranger,
mais ne pourriez-vous pas venir un instant ? « il s’est passé
quelque chose » (有些事情发生了).
Ils traversent la rue
en continuant les présentations, mais en arrivant :
他家门口有支染血的大铁枝。
我略一停步。
Devant la
porte, il y avait une grande tige de fer maculée de sang.
Je me suis
arrêté un court instant.
L’autre, cependant, n’y
jette qu’un bref regard et l’invite à entrer.
他推开了门,门后是一池塘鲜血。
“你要进来吗?没关系,他们都死了。”
Il poussa la
porte, derrière était une mare de sang frais.
« Voulez-vous
entrer ? Ne vous en faites pas, ils sont tous morts. »
Ce qui « s’est passé »,
c’est que Chen Luyuan a tué sa femme et ses quatre enfants, qui
baignent dans leur sang. Ce qui suit est un exemple-type du
style et du ton de Wong Bik-wan qui
mérite le détour :
La lumière était encore allumée dans la pièce, la télévision diffusait
un film muet cantonais,
l’électrophone était allumé, et jouait la suite pour violoncelle seul
numéro un de Bach (1). Chen Luyuan prêta l’oreille, l’air
paisible et rayonnant d’un disciple du Christ : « Quelle belle
musique. Tellement religieuse, elle évoque les églises
gothiques, les pyramides de l’Egypte ancienne, elle nous fait
lever les yeux, lever les yeux ---- et la vie, en un clin d’œil,
s’est envolée. Vous aimez la musique de Bach ? »
Le narrateur est figé
là, les baskets pleins de sang, devant les enfants assis tout
droit, les yeux fixes comme s’ils regardaient la télévision. Il
propose d’aller faire une déposition à la police, mais, lui dit
l’autre toujours aussi calme et détaché :
« 不用急,我弄了咖啡。喝一杯才去报警吧。反正我都在。 »
« Rien ne presse, je
vais faire du café, vous irez faire la déposition quand vous
aurez bu une tasse. De toute façon, je ne bouge pas. »
« Ecoutez. La musique
de Bach, ces reprises, c’est infiniment douloureux, et
inéluctable. Vous êtes allé à la Nouvelle Eglise d’Amsterdam ?
(2) J’y ai entendu la musique de Bach jouée à l’orgue. En
Europe, les choses sont anciennes et respirent la paix. Quand
nous sommes revenus à Hong Kong ----- nous avons trouvé notre
immeuble détruit, et cela ne faisait pourtant que trois ans
qu’il avait été construit ---- vous aimez la musique de Bach ? »
(3)
On sent bien sûr la
criminologue percer derrière la romancière, mais, plus
profondément, au-delà du fait divers, tout est dit, par bribes
et allusions : la douleur d’exister en un monde qui change trop
vite et anéantit tout ce qui faisait le charme indicible de
l’existence, la musique, la culture et la joie profonde d’une vie tranquille.
Ces quelques lignes
sont un concentré du meilleur de Wong Bik-wan : une froideur
calculée, un rien provocatrice, recélant un monde d’humanité,
une élégie nostalgique sur la Hong Kong d’autrefois. C’est un
texte dont la fragmentation stylistique traduit la
déconstruction de l’identité vécue par des gens qui ont perdu,
avec leur ville, leurs repères et leurs racines.
La subversion
séduisante
Tous les écrits de
Wong Bik-wan reprennent les mêmes caractéristiques
stylistiques, avec des variations sur les thèmes, mais toujours
dans le même ton. C’est ce qu’un doctorant de l’université de
Hong Kong de sciences et technologies,
Tai Yilin (戴綺莲),a qualifié dans une thèse sur le sujet (4)
d’esthétique de la
« subversion séduisante » (诱惑的颠覆性).
La subversion, dans
les nouvelles de Wong Bik-wan, s’attache incidemment à détruire
le modèle binaire de la société traditionnelle et de sa morale,
en particulier l’opposition classique hommes/femmes, en en
soulignant les contradictions et ambiguïtés. C’est en
particulier dans cet accent mis sur l’hétérogénéité du monde
actuel en opposition à la notion de centre et de valeurs
culturelles homogènes que réside son « postmodernisme », la
subversion s’étendant ensuite à tous les aspects de la langue, y
compris phoniques et graphiques.
Au-delà de Zhang
Ailing
La notion
traditionnelle de l’amour, en particulier, est
constamment remise en cause dans son œuvre, avec en
parallèle une satire corrosive de l’institution du
mariage.L’une
de ses premières nouvelles, « Elle
est une femme et moi aussi » (《她是女子,我也是女子》)
traite ainsi, sur un mode retenu, naturel et sans
provocation, de la relation affective liant deux jeunes
étudiantes que la vie va vite séparer. Il n’y a pasd’amour
heureux, comme dit la chanson.
Une nouvelle
plus longue et ultérieure, « Un amour à l’âge
d’or » (《盛世恋》), semble en former comme l’autre partie
d’un diptyque : ici, il s’agit de l’amour d’une étudiante, Chen
Shujing (程书静),
tombée amoureuse de son professeur, Fang Guoshu (方国楚). Ils finissent par se marier, et, inévitablement
(不得不如此
comme il est dit et répété dans « La ville perdue »),
par divorcer. On pense à la « trilogie de
l’amour » (三恋)
de
Wang Anyi, mais
l’atmosphère est surtout celle des nouvelles de
Zhang Ailing, eten particulier celle qui se passe, justement, à
Hong Kong : « Love in a fallen city » (《倾城之恋》).
« Elle est une femme
et moi aussi »
(《她是女子,我也是女子》)
« Un amour à l’âge d’or »
(《盛世恋》)
On a
d’ailleurs souvent cette impression en lisant Wong
Bik-wan, mais
elle va plus loin dans la subversion que ses consoeurs
de Shanghai : elle pousse la désolation au maximum,
jusqu’à la cruauté. L’un de ses sujets favoris est le
mariage et ses conséquences funestes « Le mariage est le
tombeau de l’amour », (婚姻是爱情的坟墓), ou encore
« Marx a dit
que le mariage est de la prostitution
institutionnalisée » ( 马克思说婚姻是制度化卖淫).
En fait, le
mariage, le plus souvent chez elle, c’est la guerre
froide. C’est aussi la dégradation progressive des
sentiments et de l’acuité sensitive, ce qui est rendu
avec une cruauté caractéristique, juste suggérée, à la
fin de la nouvelle citée, « Un amour à
l’âge d’or ».
Chen Shujing
donne rendez-vous à Fang Guoshu dans un restaurant
italien. « Ah, lui dit-il, tu t’es acheté une
nouvelle robe ? ».
« Non, répond-elle, elle n’est pas neuve. » « Ah, dit l’autre
étonné, je ne t’ai jamais vu dans une robe de cette couleur ».
En réalité, le restaurant est celui de leur première
rencontre, et la robe celle, blanche, qu’elle portait alors,
simplement elle a jauni avec le temps. Et l’auteur conclut avec
une de ces phrases qui font les beaux jours des amateurs de
citations :
“原本是白色的,搁旧了,看着便有点米黄……国楚,很多事情,都在不知不觉间搁旧了。”
En fait, elle était blanche, mais elle a vieilli, alors elle a l’air un
peu crème… Guoshu, il y a beaucoup de choses qui, sans qu’on
s’en rende compte, vieillissent avec le temps. »
Le monde de Wong
Bik-wan est un monde hostile, dominé par la désillusion et le
désespoir.
Un écrivain en
symbiose avec son temps
Si Wong Bik-wan
rappelle souvent
Zhang Ailing, ce n’est peut-être pas très
étonnant : on ne le sait guère, mais elles ont grandi toutes les
deux dans un contexte parental très semblable.
La mère de Wong
Bik-wan est morte quand elle était très jeune, et son père était
un policier très violent. Elle-même a révélé qu’elle avait
grandi « dans une famille explosive » ("我成长在一个暴力的家庭"). Une fois
qu’elle était sortie sans doute sans l’accord de son père, il
l’a battue au point qu’elle dut garder le lit pendant un mois.
Parvenue à l’âge
adulte, elle a continué longtemps à en faire des cauchemars.
Dans la postface
d’« Après » (《其后后话》), elle a écrit :
我不能够做一个快乐正常的人,这是我一生最大的失败与欠缺q
Je suis incapable d’être un être normal, heureux, c’est le plus grand
défaut et la défaite majeure de mon existence.
De là vient le ton de
ses nouvelles : une sorte d’esthétique de la désillusion et de
la cruauté peut-être plus encore que de la subversion. C’est une
expérience personnelle, se traduisant dans des nouvelles et un
style propres qui correspondent bien à la « maladie du siècle de
la génération de la désillusion » de Hong Kong.
Son dernier recueil,
« Silencieux. Sourd. Minuscule » (《沉默。喑哑。微小》),
dépeint cependant des personnages bien plus ordinaires que dans
ses œuvres passées, telle cette vieille dame devenue sourde mais
qui continue à répondre au téléphone, et à jouer au mahjong avec
ses amis.
On peut trouver ce
nouveau style un peu décevant, mais il reste incisif : l’un des
personnages est un jeune garçon qui a assisté au meurtre de ses
parents et, après être tombé dans le coma, se réveille sans se
souvenir de rien ; chaque fois qu’il va voir le psychiatre, il
s’endort. Peut-être qu’il est tout simplement très fatigué, dit
le psychiatre, à seize ans, il a déjà vécu tant de drames.
Comme la vieille dame,
il pourrait dire : « Je me sens simplement épuisée, je pensais
juste que dormir un peu me ferait du bien ». (“我只是觉得倦,以为睡着了便好。”).
Les temps ont changé,
Wong Bik-wan aussi, c’est un écrivain en symbiose avec son
époque.
Notes
(1) Ce n’est évidemment
pas choisi au hasard, la musique évoque le recueillement
religieux, grave mais profondément serein. Le disque passe
depuis un certain temps, la suite n’en est donc pas au début, il
faut imaginer la scène avec, par exemple, la sarabande :
ou le menuet :
(2) La Nieuwe Kerk, au
centre d’Amsterdam, est l’église nationale des Pays-Bas. Ses
concerts d’orgue sont réputés.
(3) Le thème de la musique
est repris vers la fin de la nouvelle, alors que, la peine de
mort de Chen
Luyuan ayant été convertie en prison à perpétuité, le narrateur
lui rend visite en lui apportant un baladeur avec des écouteurs,
et un enregistrement du Messie de Haendel, dont la musique « est
comme une main glacée apportant le réconfort à nos âmes confuses
et brûlantes » (象一只冰凉的手,让我们慌张火热的心灵,得到安慰). Le narrateur
comprend alors soudain Beethoven et sa surdité : la musique est
le langage de la solitude (音乐是孤独者的语言).
(4) “诱惑的颠覆性 :
黄碧云小说的后现代美学”(Seductive
subversiveness : Wong Bik Wan's fiction as a postmodernist
poetics), University of Hong Kong of Science and Technology,
School of Humanities and Social Sciences, 2002.