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				A lire : « Le show de 
				la vie », traduction d’un roman de Chi Li 
				par Brigitte Duzan, 11 janvier 2011   
					
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						« Le show de 
						la vie » (《生活秀》), 
						paru le 5 janvier dernier, est le neuvième titre (1) de
						
						
						Chi Li (池莉)
						
						traduit en français, par les éditions Actes Sud, dans leur collection 
						« Lettres chinoises » dirigée par
						
						
						Isabelle Rabut. 
						  
						  
						Depuis que Chi 
						Li a commencé à publier des nouvelles, en 1982, elle a 
						en effet écrit, dans un style simple et réaliste, un 
						nombre considérable de nouvelles et romans qui, en 
						formant comme un kaléidoscope de portraits 
						essentiellement féminins, dessinent une image au ras du 
						sol de la vie quotidienne des citadins ordinaires dans 
						la Chine d’après Mao.  
						  
						Wuhan comme 
						si vous y étiez 
						  
						Comme la 
						plupart de ses autres livres, « Le show de la vie » (《生活秀》) 
						se passe à Wuhan, la grande métropole du Hubei 
						représentative des grandes conurbations de  
						l’intérieur de 
						la Chine, où Chi Li a grandi et vit encore, et qui 
						constitue la toile de fond et l’âme de ses récits.
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						Le show de la vie |  
				  
						Pour être plus 
						précis, l’histoire se passe dans une vieille rue de Wuhan devenue 
				célèbre depuis la parution du livre, en 2000 : la rue Jiqing (吉庆街), 
				artère typique de petits restaurants en plein air qui s’animent 
				la nuit. Le personnage central du roman est une femme, Lai 
				Shuangyang (来双扬), 
				qui tient, justement, l’un de ces petits restaurants ; le sien 
				est spécialisé dans les cous de canards, et elle lui a donné le 
				nom de son plus jeune frère : le restaurant de Jiujiu (久久饭店). 
				(2)   
				La Chine du miracle 
				économique vue au ras du sol 
				  
				Lai Shuangyang est 
				typique de l’univers de Chi Li, c’est-à-dire des classes 
				populaires des grandes villes chinoises : une femme du peuple, 
				donc, qui a commencé à travailler à quinze ans pour nourrir ses 
				deux frères et sa plus jeune sœur lorsque son père a abandonné 
				sa mère pour aller vivre avec une autre femme, chose courante. 
				Mais Shuangyang avait le sens des affaires, elle a été la 
				première, dans la rue, à ouvrir une petit échoppe, juste au 
				moment où Deng Xiaoping lançait la politique d’ouverture, et 
				encourageait les Chinois à monter leurs propres affaires et à 
				s’enrichir. Son destin avait rendez-vous avec celui de la Chine.   
					
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						Edition chinoise 2002 |  | 
						Elle a réussi, 
						Shuangyang, elle est devenue une célébrité dans la rue, 
						et grande gueule comme il se doit dans ces 
						circonstances. Elle n’est pourtant pas au bout de ses 
						peines, que Chi Li semble multiplier à plaisir : son 
						petit frère Jiujiu, drogué, est dans un centre de 
						désintoxication, sa plus jeune sœur, pigiste à la 
						télévision, œuvre à la fermeture des gargotes du 
						quartier pour en éliminer les nuisances sonores, son 
						frère est marié avec une prétentieuse au chômage qui ne 
						rêve que de faire fortune en bourse, et lui laisse leur 
						fils chaque fois qu’elle a à faire ; quant à la maison 
						familiale, qui a été au fil du temps, pièce après pièce, 
						‘affectée’ à des étrangers, elle est  difficile à 
						récupérer.  
						  
						Sous la plume 
						de Chi Li, cependant, l’accumulation des soucis de 
						Shuangyang paraît on ne peut plus normale, éclipsant ses 
						problèmes affectifs, et devient même une image parfaite 
						du type de problèmes que rencontre le  |  
				citadin moyen dans la 
				Chine du miracle économique. Les solutions, cependant, n’ont 
				rien de miraculeux : la simple perpétuation des traditions 
				d’antan. Pour rabaisser la morgue de sa belle-sœur, rien de tel 
				que de la prendre à partie sur la place publique, et, pour 
				récupérer la maison familiale, la voie idéale est de marier une 
				de ses jeunes employées au fils un tantinet anormal du chef de 
				section du Bureau du Logement – tout le monde y gagne, y compris 
				la jeune fille qui n’avait guère d’autre possibilité de sortir 
				de sa condition paysanne.   
				Toute la Chine moderne 
				est là, la Chine profonde, celle qui avance à grands pas dans 
				les statistiques, mais à tout petits pas dans les mentalités.
				 
				  
				Adaptations 
				  
				Le roman a connu un 
				immense succès en Chine, comme tous les livres de Chi Li. Il en 
				existe une version beaucoup plus longue, en cinquante et un 
				chapitres, avec une foison de personnages supplémentaires, qui a 
				servi de base au scénario d’un feuilleton télévisé en vingt cinq 
				épisodes, diffusé fin 2001. Chi Li a également vendu les droits 
				d’adaptation pour en faire une pièce de théâtre, et même un 
				opéra.  
				  
				Il existe par ailleurs 
				une remarquable adaptation cinématographique : le film éponyme 
				est fidèle à la trame du roman et à son atmosphère tout en 
				dégageant une subtile différence. L’analyse comparée du roman et 
				du film permet de faire ressortir les qualités réciproques des 
				deux œuvres. 
				  
				Lire en complément : 
				
				
				 « Le show de la vie » (《生活秀》) : 
				roman de Chi Li (池莉) et film de Huo Jianqi (霍建起) 
				  
				
				Notes : 
				(1) Il s’agit en fait 
				non vraiment d’un roman, mais d’une nouvelle ‘de taille moyenne’ 
				(中篇小说). 
				(2) Le traducteur, 
				Hervé Denès, s’est trouvé devant un redoutable problème 
				d’homophonie dans la transcription des prénoms : le frère aîné 
				de Shuangyang et sa sœur cadette s’appellent tous les deux 
				Shuangyuan en pinyin non accentué qui est la transcription 
				habituelle ; la différences est dans les tons : shuāngyuán
				双元
				pour l’un, 
				shuāngyuàn 
				双瑗
				pour l’autre.  
				Hervé Denès a donc opté pour la traduction des noms, en essayant 
				de coller à la signification des caractères tout en conservant 
				une logique de prénoms, voire en jouant sur les assonances, 
				comme dans le cas de Jiujiu, traduit  Eternité, et contracté en 
				Tété…  
				  
				  
				  
				  
				  
				  
				    
					   
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