Nouvelles de a à z

 

« Il ne faut jamais manquer de répéter à tout le monde les belles choses qu’on a lues »

Sei Shōnagon (Notes de chevet)

 
 
 
     

 

 

Li Tuo  李陀

Septième grand-mère 《七奶奶》

par Brigitte Duzan, 04 janvier 2013

 

Cette nouvelle de Li Tuo (李陀) fait partie des dernières qu’il a écrites avant de décider de ne plus se consacrer qu’à la critique littéraire. Elle date de 1982.

 

Au sortir de la « littérature des cicatrices », la tendance était à l’introspection, à la « littérature de réflexion » (反思文学). Mais ce texte, extrêmement novateur, témoigne des recherches faites par l’auteur sur la forme autant que sur la langue :

-   c’est un long (pseudo) monologue, écrit en « flux de conscience », à la manière de Virginia Woolf, qui rappelle  en particulier les premières nouvelles de la romancière, dont « The Mark on the Wall ». A travers le délire d’une vieille femme, dont on devine qu’elle est grabataire à travers les vains efforts qu’elle fait pour bouger, c’est toute une époque qui est subtilement évoquée, une transition entre deux mondes : le monde de son enfance, confronté à celui qui va bientôt la voir mourir, et sur lequel elle n’a déjà plus prise ;

-   c’est un texte ciselé, dont la langue est celle de la rue, à Pékin, mais une langue populaire travaillée qui acquiert une qualité presque littéraire, but recherché par Li Tuo.

 

La différence avec la nouvelle de Virginia Woolf est que la fin reste ouverte, sans conclusion : rien ne se passe, juste un flot de souvenirs et de pensées, des idées qui tournent en rond, autour d’une obsession centrale. Il n’y a pas de trêve aux divagations de la vieille femme, comme il ne peut y avoir de trêve à sa souffrance physique.

 

NB : n’est donnée ci-dessous que la traduction du premier quart, environ, de la nouvelle ; cela permet d’avoir une très bonne idée de la manière dont le texte est construit et écrit. La suite n’est qu’un développement à partir des principales idées qui sont exposées là.

                        

            先是一股子很冲的,掺合着1葱姜味儿的韭菜香2,那准是北屋老常家要包韭菜猪肉馅3的饺子。后来又是一股子白面饼烙焦了4的糊味儿。那多半是西屋刘家四丫头小四儿净顾着看书,忘了给饼翻个儿,再后来又是一股子炖5鱼的香味儿,可七奶奶猜不出这是谁家了。不过她顾不上分心6去弄清这个。她一门的心思都在自己家的小厨房上。小厨房就在七奶奶屋子的对过儿。儿媳妇玉华7刚下班回来,正在那里头忙活。七奶奶费劲儿地往上欠欠身子,瞪着眼睛使劲儿往那边瞧9。可一来窗台外边搁了两盆儿仙人掌10,正好挡眼,再者这两年她的青光眼11越来越厉害,所以窗户外边什么都是影影绰绰的。这么着,玉华到底在小厨房里忙活什么,她怎么也看不清。只有那么一会儿,她模模糊糊地觉着玉华多半儿正在那儿捅炉子12。她要是耳朵不像现在这么半聋13就好了。那她凭着小厨房里的响动,也能听出儿媳妇在厨房里的所做所为,还准八九不离十。可现在,玉华到底捅没捅炉子,她怎么也弄不清。这让她心里急得厉害。她用两只胳膊撑着14床,想把下半截身子往床边儿挪挪16。挪到床边儿,她就能躲开那两盆碍眼的仙人掌了,可盘在一块儿的两条腿,就像在床上生了根,一点动不了窝儿17。不过她一点儿不灰心18。她把上半身使劲儿往前探,再把两只胳膊往前伸,左右手都扒住床沿,使足了力又试了一回。谁想不成。往日这法子挺灵,可今天一点儿用没有。她不死心,咬着牙,忍着心跳气喘,两手死抓住床沿继续使劲儿。可一阵突如其来的19咳嗽,到底让她松了手。这阵咳嗽叫她翻肠倒肚,没一会儿功夫,豆粒大的汗珠子就流满了脸、脖子、脊梁背20。她觉着嗓子眼儿里21堵了一团棉花,憋得22眼珠子都往外胀。她只能在一串咳嗽刚停,下一串咳嗽还没涌上来之前23那么个小空儿里,赶忙倒上一口气。她真怕这一口气倒不上来,就这么死过去。不过,就这样,她的心思还是全在小厨房上。玉华到底是不是正鼓捣24煤球炉子?她到底在干什么?眼眶里全糊满了眼泪、汗珠子。她眼前一片白??的,连影影绰绰那些东西也看不着了。刚才她觉着是炉子没对住,火灭了,玉华在捅炉子重生火。要是那样儿,这会儿应该能闻着烟味儿了。劈柴没烧旺之前25,总得冒一阵子白烟。可眼下一点烟味儿闻不着。倒是老常家韭菜猪肉馅饺子出锅那股淡淡的香味飘过来了。刚出锅的饺子就是香。

 

1. 掺合 chānhé mélanger  2. 葱姜 cōngjiāng oignon / gingembre  韭菜 jiǔcài ciboule

3. xiàn farcir  4. 烙焦 làojiāo faire brûler (à la cuisson)  5. dùn cuire à l’étuvée

6. 顾不上分心 gùbushàng fēnxīn ne pas se laisser distraire  7. 儿媳妇 érxífù bru

8. qiàn ici : lever légèrement  9. qiáo regarder  10. 仙人掌 xiānrénzhǎng cactus

11. 青光眼 qīngguāngyǎn  glaucome  12. 捅炉子 tǒng lúzi tisonner le feu

13. lóng sourd  14. chēng s’appuyer sur  15. jié partie  16. nuó bouger

17. /挪窝儿 (dial) dòng/nuó wōr changer de place 18. 灰心 huīxīn se décourager

19. 突如其来的 tūrúqíláide inattendu, soudain  20. 脊梁 jǐliáng colonne vertébrale

21. 嗓子眼儿 (dial) sǎngziyǎnr gorge 22. biē  suffoquer  23. yǒng déferler

24. 鼓捣 (dial) gǔdao bricoler  25. 劈柴 pǐchái petit bois 烧旺 shāowàng bien brûler

 

Il y avait eu d’abord une odeur, très forte, où se mêlaient des effluves d’oignons et de gingembre, avec des relents de ciboule ; c’étaient à coup sûr les Chang, les voisins du nord, qui étaient en train de faire des raviolis farcis à la viande de porc assaisonnée de ciboule. Il y eut ensuite une vague odeur de galette de froment brûlé. A tous les coups, c’était la quatrième fille des Liu, la famille à l’ouest, qui était encore plongée dans ses bouquins et avait oublié de retourner la galette. Cette odeur-là fut suivie d’une senteur de poisson à la vapeur, sans que la septième grand-mère parvînt à deviner d’où elle pouvait bien venir. Mais ce n’est pas ce qu’elle cherchait à élucider. Toute son attention était en fait tournée vers la cuisine familiale, située en face de sa propre habitation. Sa bru Yuhua venait juste de rentrer du travail et s’y affairait. La septième grand-mère concentra toutes ses forces pour se dresser un peu, et pouvoir y jeter un coup d’œil. Mais il y avait, posés sur le rebord de la fenêtre, deux pots de cactus qui lui bouchaient la vue ; qui plus est, ces deux dernières années, son glaucome n’avait fait qu’empirer, si bien qu’elle ne percevait que de façon très floue ce qui se passait de l’autre côté de la fenêtre. Elle ne pouvait donc pas discerner ce que Yuhua pouvait bien faire dans la cuisine. Un instant auparavant, elle avait eu très vaguement l’impression qu’elle était en train d’attiser le feu. Si seulement elle n’avait pas été aussi sourde, ça aurait aidé. En écoutant les bruits provenant de la cuisine, elle aurait pu en déduire assez précisément ce que Yuhua y faisait. Mais, en l’occurrence, elle n’avait aucun moyen de savoir si Yuhua était ou non en train d’attiser le feu, ce qui l’énervait terriblement. Elle tenta de se soulever du lit en s’appuyant sur les deux bras, pour faire glisser le bas de son corps vers le bord du lit. Parvenue là, elle aurait pu écarter les deux pots de cactus qui lui obstruaient la vue, mais il lui sembla avoir pris racine dans le lit, impossible de bouger d’un pouce. Pas question pourtant de se décourager. Elle concentra ses efforts sur le haut du corps, et, tendant les bras en avant, agrippa des deux mains le bord du lit en essayant encore une fois de toutes ses forces de déplacer son corps. Elle y était déjà arrivée. Dans le passé, cette méthode lui avait très bien réussi, simplement aujourd’hui ça ne marchait pas. Elle ne voulait pourtant pas abandonner ; serrant les dents, le cœur battant et le souffle court, elle continua à s’accrocher des deux mains au bord du lit, de toutes ses forces. Mais une brusque quinte de toux la força à desserrer les mains. Cette toux la plia en deux ; en un rien de temps, des gouttes de sueur grosses comme des haricots lui inondèrent le visage, le cou, le dos. Elle eut l’impression qu’on lui avait fourré une boule de coton dans la gorge et elle étouffait au point que les yeux lui en sortaient de la tête. Quand la quinte eut cessé, dans le court intervalle de temps avant que ne survienne la suivante, elle se dépêcha de reprendre souffle. Elle avait très peur de ne pas y parvenir, et de mourir là. Mais même ainsi, toutes ses pensées étaient concentrées sur la cuisine. Yuhua était-elle, oui ou non, en train de trifouiller le charbon du fourneau ? Qu’est-ce qu’elle pouvait bien fabriquer ? Ses orbites s’emplirent de larmes, de sueur. Un voile blanc lui passa devant les yeux ; elle n’arrivait même plus à percevoir indistinctement les choses au dehors. Alors qu’elle pensait que le fourneau n’était pas allumé, que le feu était éteint, voilà que Yuhua le tisonnait. Mais, dans ce cas, elle aurait dû sentir l’odeur de la fumée, la fumée blanche que dégage toujours le petit bois avant qu’il se mette à bien flamber ; mais là, elle ne sentait rien. Ce qu’elle sentait bien, en revanche, c’est, venant de chez les Chang, cette légère senteur de raviolis farcis à la viande de porc assaisonnée de ciboule juste sortis de la poêle.  Quand on les sort de la poêle, c’est fou ce que les raviolis sentent bon.  

  
           
她小时候,鼻子就灵得出名。那时候她爸爸喝酒,也喝不多,每天拉车回来,进门儿就一两酒,喝完了闷头就睡。那酒都是她提着小锡壶1去打的。每回她都遢拉着2她妈那双掉了后跟的布鞋,连下雪天都是。那时候冬天可真冷。一下雪就半尺厚,少说也得没脚脖子3。有一年大年初一4——到底是哪一年记不清了——一夜大雪,早晨起来家家户户开不开门。 你咳嗽一声, 从树杈上就掉雪面儿。那时候可不像现在。如今不知怎么了,冬不冬,夏不夏。那时候可不像现在。就说喝水,那时候喝的什么水?见天早晨挨家挨户送5。小毛驴儿拉着水车,吱??的,到谁家门口儿自己就站住。水车上长的那层绿苔毛6,水淋淋的,又鲜灵又好看。那水可都是井水,没漂白粉7。那时候做买卖跟如今也不一样。夜里卖馄饨8,小车推到家门口儿,馄饨都开着锅。不过她可没吃过,吃不起。

 

1. 锡壶 xīhú pot en étain  2. 遢拉 tàlā cf 邋遢 lātà négligent

3. 脚脖子 jiǎobózi (dial) cheville

4. 大年初一 dàniánchūyī le jour du Nouvel An (lunaire)

5. 挨家挨户 āijiā āihù  de maison en maison  6. tāi mousse

7. 漂白粉 piǎobáifěn  produit désinfectant, chlore

8. 馄饨 húntún  sortes de petits raviolis

 

Quand elle était petite, elle était connue pour la finesse de son odorat. A l’époque, son père buvait de

l’alcool, pas beaucoup, mais tous les jours, quand il avait fini de tirer son pousse et qu’il rentrait à la maison, il en buvait dans les cinquante centilitres ; ça lui montait à la tête et il s’endormait aussitôt.

L’alcool, c’est elle qui allait le chercher, dans un petit pichet en étain. Chaque fois, elle y allait dans ses fichues vieilles sandales de toile usées jusqu’à la corde, même quand il neigeait. A cette époque, les hivers pouvaient être vraiment froids. Dès qu’il neigeait, il en tombait une bonne couche, on en avait tout de suite jusqu’aux chevilles. Une année, le jour du Nouvel An – elle avait oublié quelle année exactement – il avait neigé toute la nuit et, au petit matin, au réveil, il était impossible d’ouvrir les portes. Quand on toussait, il vous tombait des arbres des paquets de neige dessus. Ce n’était pas comme maintenant. C’est n’importe quoi, aujourd’hui, il n’y a plus d’hiver, plus d’été. Autrefois, c’était différent. Pour l’eau, par exemple, quelle eau buvait-on ? En fait, l’eau était livrée à la porte tous les matins, apportée sur une charrette grinçante, tirée par un petit âne qui s’arrêtait devant chaque maison. Elle était couverte d’une couche de mousse imbibée d’eau, d’un vert tendre, superbe. C’était de l’eau de puits, elle n’avait pas de chlore. A l’époque, on ne faisait pas non plus du commerce comme maintenant. La nuit, il y avait des vendeurs de petits raviolis qui passaient avec leur charrette devant chaque porte, et les raviolis sortaient juste de la poêle. Elle n’en avait jamais mangé, pourtant, elle ne pouvait pas s’en payer.

 

            她吃过芸豆饼1。那也是夜里卖。都是半夜,街上冷清了,卖芸豆饼的才背着木桶出来吆喝2。

            “芸豆――!”那一声吆喝还带脑后音儿,像黑头3,几条胡同儿都听得见。这会儿一个“送货上门”4就当成事了,那时候全是“送货上门”。砸个盆儿摔个碗儿5,锔锅匠6坐门口儿就锔上了。就是卖酒的不上门儿。她得见天提着那把瘪7肚子的锡壶去打酒,每回就一两。每回她都遢拉着她妈那双掉了后帮的大鞋。甭管刮风下雨,多冷多热,这酒她一定得打,不然就挨揍8。那时候她鼻子可真好,酒里搀水9,搀多搀少,她一闻就知道。每回她都得跑几家铺子,找兑水最少的酒买。有一回她走了好几个铺子,酒里水都太多,一直走到四牌楼才打上酒。回家挨了顿揍,笤帚疙瘩都打折了11。那时候她鼻子真灵。

 

1. 芸豆饼 yúndòubǐng galette de haricots rouges  2. 吆喝 yāohe crier

3. 黑头 hēitóu  personnage de l’opéra chinois dont le visage est peint en noir.

  脑后音儿 nǎohòuyīnr  voix de tête (ou de fausset) typique de ce genre de rôle

4. 送货上门 sònghuò shàngmén livrer à domicile 5. casser

6. réparer (un bol … cassé)  7. biě desséché/dégonflé, vide

8. 挨揍 áizòu se faire battre  9. 搀水 chānshuǐ diluer

10. 笤帚 tiáozhou balai 疙瘩 gēda nœud  shé casser (net)

 

Ce qu’elle mangeait, c’étaient des galettes de haricots rouges, qui se vendaient aussi la nuit. C’est vers minuit, dans les rues désertes, que retentissait le cri du marchand de galettes de haricots rouges qui passait, sa hotte de bois sur le dos : « Haricoooots rouges ……… ! ». Proféré d’une voix de tête, comme celle d’un « visage noir » à l’opéra, ce cri s’entendait dans tout le quartier. A

l’époque, tout était vendu à domicile,

 

Sipailou

on vous apportait tout à la porte. Si vous cassiez un plat, un bol, il y avait un artisan spécialisé qui venait vous clipper les morceaux. Mais l’alcool ne se vendait pas comme ça, il fallait y aller. Elle devait tous les jours prendre son pichet d’étain vide pour le faire remplir, cinquante centilitres chaque fois. Et, chaque fois, c’était chaussée de ces fichues savates complètement éculées qu’il lui fallait aller chercher

l’alcool, qu’il pleuve ou qu’il vente, qu’il fasse un temps glacial ou à crever de chaud, faute de quoi elle aurait récolté une bonne raclée. Elle avait alors un excellent odorat : rien qu’à l’odeur, elle pouvait détecter tout de suite si l’alcool avait été coupé, et combien d’eau on y avait rajouté. Alors, chaque jour, elle faisait plusieurs boutiques, jusqu’à trouver celle où l’alcool était le moins coupé. Une fois, elle en avait fait quelques unes en vain, et avait été obligée d’aller jusqu’au Sipailou (1). Au retour, elle avait ramassé une sacrée correction, les nœuds du balai en avaient cassé ! A l’époque, elle avait vraiment un super nez.    

 
           
她心里越来越急。大概正因为这么一急,这阵让人要死要活的咳嗽,倒突如其来地过去了。她赶忙用袄袖子把眼里的泪水擦了擦,又使劲往窗外看。那两盆仙人掌还是碍眼。她早就说过好几回了,让他们把这两盆东西挪开。儿子倒是答应了,可始终没真动手。这会儿她猛地想起,多半儿是儿媳妇在这里头捣了鬼1。准的。准是她不让儿子搬。她成心2。这女人可歹毒了3。她什么干不出来?好几回了,她骗她,假装说是用煤球炉子做饭,可都让她给觉出来了。她不能不防着她。这会儿她就很犯疑4。她模模糊糊地看见小厨房的门倒是开着的(这是她跟儿子定下的,只要玉华在厨房做饭,厨房的门就不能关),也看得见玉华的影子晃来晃去。可她到底在干什么?要是她劈点柴生炉子,那股烟气早该飘过来了。这烟味她闻了几十年了,她是太熟了。可这会儿她使劲用鼻子吸了半天了,除了各家的饭菜香,还是什么也闻不着。准是玉华又在骗她。一想这个,她觉着自己的头发根都竖起来了。
 

1. 捣鬼 dǎoguǐ intriguer, comploter 2. 成心 chéngxīn délibéré/exprès

3. 歹毒 dǎidú méchant, perfide  4. 犯疑 fànyí avoir des soupçons

 

Elle se sentait de plus en plus nerveuse. C’est peut-être cette nervosité qui la faisait tousser comme une malade, mais les quintes étaient soudaines. Elle s’essuya, du revers de la manche, les larmes qui lui étaient venues aux yeux, et recommença à scruter ce qui se passait dehors. Mais les deux pots de cactus la gênaient. Elle avait demandé je ne sais combien de fois qu’on écarte ces deux pots. Son fils s’était déclaré d’accord, mais n’avait rien fait. C’était sa bru qui régentait la maison, maintenant ; c’est elle qui l’avait empêché de le faire. Délibérément. Cette femme était mauvaise. De quoi  ne serait-elle pas capable ? Elle l’avait déjà trompée plus d’une fois, et voulait lui faire croire qu’elle faisait la cuisine sur le fourneau chauffé au charbon, mais elle n’était pas dupe. Elle saurait bien l’empêcher d’agir. Cette fois-ci, elle avait ses soupçons. Elle voyait plus ou moins bien la porte de la cuisine ouverte (c’est ce qu’elle avait obtenu de son fils : que la porte reste ouverte pendant que Yuhua cuisinait), et l’ombre de Yuhua qui se mouvait de ci de là. Mais qu’est-ce qu’elle pouvait bien fabriquer ? Si elle avait allumé le fourneau avec du petit bois, cela aurait tôt ou tard fait de la fumée. Cela faisait plusieurs dizaines d’années qu’elle était familière du phénomène, elle en connaissait bien l’odeur. Yuhua était certainement en train d’essayer de la tromper ; à cette pensée, elle sentait ses cheveux se dresser sur sa tête. 

 

          本来刚咳嗽完,心还跳,气还喘,这会儿心跳得更快了,气也更短了。嗓子眼儿也又堵上了。她想喊,可一阵咳嗽震得她全身乱颤,就好像有人抓住她肩膀,不管死活地使劲摇晃她。就这样,她还是想喊,在心里喊,可就是出不来声。

 

Après chaque quinte de toux, elle avait le cœur battant et le souffle coupé, mais cette fois elle avait le cœur qui battait encore plus fort et le souffle encore plus court. Elle avait toujours au fond de la gorge cette chose qui l’étouffait. Elle voulut hurler, mais une autre quinte de toux survint, la faisant trembler des pieds à la tête, comme si quelqu’un l’avait saisie par les épaules et la secouait sans pitié. Son hurlement resta intérieur, un hurlement muet.

 

            那是常六伯说的。常六儿这人从来不说不着斤不着两的话。有一家人的煤气罐不知道怎么漏了气。这家人还都上班了,家里一个人都没有。那是个单元楼,也不知道多少层,反正挺老高。漏出来的煤气跑满了一屋子,然后顺着阳台漏出去,又跑到楼下阳台,又顺着这家阳台跑进屋里。神不知鬼不觉。这煤气也跟贼似的。可巧这家里有人。大概是这家的男的,想抽颗烟,拿洋火划了下火。谁想满屋子都着了火。那火在半空儿悬着。那火还从那男的鼻子往肺里钻,那男的肺里都是煤气,就这么活活烧死了。常六儿还说,那还是便宜的,要是煤气罐爆炸,一幢楼就得满天飞。是谁发明的这种缺了八辈子阴德的东西?想想就让人心惊肉跳。拿炸弹放家里,还用它做饭,缺德哟!
           
自打那天她晕过去之后,她就一直再没见过那煤气罐。他们把它放在小厨房的北墙根了。这样,就是小厨房的小门大敞着,她也一点儿瞧不见。她先前还以为是儿子怕再惹她生气,取了这么个眼不见为净的法子。后来,好几回玉华背着她用煤气罐做饭,她这才悟出自己上了当。明着她是用煤球炉子做饭,可她根本不打开火。那火还封着,就在上边坐个锅骗人。闹得她每天每天,一到要做饭的时候,就突突地心跳。手、腿、眼睛皮也跟着一阵一阵地哆嗦。等饭端到眼跟前,她还是怕,疑神疑鬼。连用煤球炉做出来的饭,她也觉着有股子煤气味儿。今天儿媳妇下班回来得晚,没准儿又想变着法子?她。她得留神。她应该把常六伯喊来,让常六伯看看玉华的动静。得让他看着她。这会儿他的饺子也准吃得差不多了。可是这咳嗽怎么也停不住,别说喊人,连容她喘一口大气的功夫都不给。今天这咳嗽是找上她了。她急,急得两只手使劲掐自己那没什么知觉的大腿。可怎么掐也没用,别说疼,连点儿知觉都没有,好像那不是她自己身上的肉。后来她干脆打起自己嘴巴子,左手打左脸,右手打右脸,噼噼啪啪,打了足有十多下。不过这也不怎么疼,一来是咳嗽就像风摇树那样一个劲摇晃着她,容不得她使劲,二来脸上汗爬水流,手打上去老是打出溜。她只好住了手。她又往小厨房瞧了一眼,还是什么也瞧不清,只觉得玉华的影子晃了几晃。可这几晃让她心里一阵怕,浑身都哆嗦起来。她猛地有了个主意。离她四五尺远的床上,扔着把剪子。她得把这剪子扔到窗户上去。玻璃一碎,常六伯几个街坊听见动静,准都跑过来,那就好办了。可她使劲弯下腰,手还是够不着那剪子。她又不能弯腰时间太长。弯着腰咳嗽,她觉着马上就得憋死。她只好等一阵咳嗽最厉害那功夫过去,再弯下腰,用手使劲够。有两回她手指头都碰上剪子了,可就是抓不住。她急得又掐了几下自己的大腿。那煤气罐老在她眼前转。她好像听见轰隆一声,立时一片血肉横飞。她本来就一身汗,没想这层热汗底下又出了一层冷汗。不过她也没白着急,她到底把那把剪子抓到了手。可是她要把剪子扔出手的时候,心里又犹豫了。把玻璃砸碎太可惜了。这屋子她住了近五十年了,还从来没毁过什么东西。就有一回,她打了个养金鱼的玻璃缸。那缸足有一尺见圆。她把手里的剪子扬了扬,可总扔不出去。就在这功夫,一股淡淡的烟味飘了过来。她立时把剪子扔下,使劲用鼻子吸气。没错,这味儿她太熟了。她亏得没把剪子扔出去。这么把玻璃打了,她得后悔死。她闻着了烟味。她放心了。不知道谁家孩子又哭又闹。她仔细一听,原来声音是从后窗户过来的。后窗户外边是一个窄胡同。
           
不知道是谁正在这后窗户根下边打孩子。她仿佛听见那孩子在喊:我要吃驴打滚儿!我要吃驴打滚儿!
           
驴打滚儿可不怎么好吃,那东西粘牙,还噎人。可她小时候也爱吃着呢!她头一次吃,是她爸爸带她逛隆福寺的时候。那也是她头一次逛隆福寺。隆福寺后来她不知道逛过多少回,可哪次也没这头一次好玩。如今隆福寺改人民市场了,头几年她还去过一回。那怎么比隆福寺庙会那热闹劲儿哟。还叫什么市场,其实就是个不带楼的百货商店,有什么新鲜!对着隆福寺正门那趟短街,有个地方卖鸟,她最爱在那儿瞧热闹。什么八哥、鹦鹉、珍珠鸟、相思鸟,什么孔雀、野鸡、乌骨鸡(人说这路鸡的骨头是黑的,还好吃),什么鸟儿都有。
            听说有时候那儿还卖老虎,可她没见过。吃驴打滚儿可不在那儿。那得进隆福寺。进了隆福寺有三趟街。中间那趟街最热闹。那儿摆摊子卖艺的最多。宝三儿的摔跤和中幡,狗男女的全家乐,云里飞滑稽二簧,还有说书的、拉洋片的、变戏法的。那儿也卖豆汁儿、馄饨、炸灌肠、面茶、梅花糕、棉花糖、压
??。顺着这些小摊过去,是看相的,算卦的,卖洋烟画的。再往前走就是后门。她在那儿看过一个要饭花子坐在地上要钱,手里拿着一块灰砖头咣咣一个劲儿砸自己的胸脯。那花子头发、胡子都发了白。可身上脏得漆黑。那花子身边老蹲着一条大黑狗。人说那狗是花子头儿派的。有哪一个花子得了钱要想装自己腰包,那狗上去就咬,专咬男人最娇气那地方。也不知道是真是假。隆福寺西迎那趟街,也卖吃的。打庙西门一进去,就是一个卖粘糕的大摊子。那粘糕花样儿可多了。冬天有蒸笼蒸出来的烫嘴的豆铲糕,夏天有冰镇去火的凉糕,秋天有栗子糕,春天有鲜玫瑰花糖卤浇的小枣粘糕。那些糕都比驴打滚儿好吃。那时候她家就住隆福寺旁边。每月逢九逢十她没有不去逛隆福寺的。为了不挨打,她每回都带着弟弟。她给他买猴拉稀吃,有时候也买布布登儿、玻璃球。猴拉稀现在也没有了,那东西哄孩子最好了,又便宜又实惠。这都过去多少年了?她不怕死,就是死之前能再逛一回隆福寺庙会就好了。上个礼拜她一连做了三天梦,天天梦见自己带着弟弟逛隆福寺,买鸡毛掸子,买小金龟儿,卖笼屉。如今使上高压锅了。听说那东西也能爆炸,能把人脑袋崩开了花。干嘛现在用的这些家什都能顶炸弹使,这到底是图的什么呀?
           
她大概是迷糊了一会儿。可她又猛地一下醒了过来。她老是这样,白天黑夜睡不踏实。这种似睡非睡的难受劲儿,真叫人累得慌。她欠欠身子,又透着窗户往小厨房那边瞧,还是什么也瞧不清。那两盆仙人掌太碍眼了。再说刘家那只黑白花的大狸猫不知道什么功夫跳到窗台上了。这猫正好卧在两个花盆中间。这一来她连厨房的门都瞧不着了。这时候正是西晒,太阳光先落在大狸猫和仙人掌上,又带着猫和仙人掌的影子落到床上。七奶奶的手、脚、膝盖也都晒得暖和和的。她又要迷糊,可激灵一下又醒了过来。她吸了两下鼻子,不由得犯疑:这烟味怎么这么快就过去了?这么会儿劈柴就能烧完了?她猛然想,没准儿儿媳妇还是在变着法子胡弄人。

            那烟没准儿是她弄的假招子。这人是个地道的狐狸精,专会迷惑人。没有她,儿子也不会死乞白赖非买这个煤气罐不可。

            都是她煽的,都是她出的坏!没有这女人,准天下太平。要没有她,她何至于落个下半身瘫痪,何至于坐在这床上成了个说死不死、说活不活的废人!?她不知不觉就咬起了牙,咬得咯吱咯吱一个劲儿响。
           
那天她正和常六伯坐在葡萄架底下,一边喝茶一边聊天。
常六伯正跟她夸她的儿子。常六伯说:您那儿子,嘿,这个!

             说着他把右手那么一伸,右手上的大拇指那么一挑。儿子就是那时候进的院门。他推着车,车后座上捆着那个圆不圆、长不长的铁家伙。她一见那玩意儿,登时觉着头发都立了起来。
           
她小时候见过一次鬼。那次正好在天擦黑的时候她路过一块坟地。那坟地周围都是柏树。萤火虫就在柏树枝和荒草堆里飘过来飘过去。那鬼就在一块石碑后头立着,一身白,脸上没五官,像麻将牌的白板。那可真把她吓坏了,头发根也都一根一根立了起来。她一溜烟儿跑回家,一连病了三天。可家里搁个煤气罐那比家里养个鬼还吓人,让你头发根天天立着。那天可把全胡同的人都惊动了。她要不是猛古丁两眼一黑倒在地上,她能在厨房门口堵上三天三夜。那时候她也是又咳嗽又喘,什么话也说不上来。她真想把拐棍抡圆了给那小娘们几下子,可力不从心。她这辈子忘不了她那双眼睛,那真凶。她本想当着那么多街坊给儿子下跪。你妈给你跪下!让大伙儿瞧瞧当妈的怎么给儿子下跪!可她一瞧见儿媳妇那双眼睛,不知怎么就晕了过去。人死如灯灭。其实那时候死过去就好了。
           
虽说她没听见葱花下锅时候的爆响儿,可凭着这股葱花在热油里煎出来的香气,她知道这葱花是刚下锅,这会儿还正在油里翻腾。这一定是玉华开始炒菜了。这味儿离她太近了,只能是从她家的小厨房里散出来的。一闻到这葱花味儿,她立时心宽了好多。这下行了,这一天总算熬过来了。不光是她,全院十来户人家,再加上挨着这院的左邻右舍,总共也得五六十户人吧,也都跟着她熬过来了。就窗台上的大狸猫不知好歹,爬在那儿一个劲儿睡。不过这猫到底也睡够了。
           
它先是站起来在花盆的边上蹭痒痒,然后又弓着背,仰着头,使足劲打了个大呵欠,跳下窗台跑了。这下两个花盆之间的空处腾出来了。她赶紧又欠起身子,使劲儿往厨房那边瞧。谁想太阳正照着她的脸。她越瞪大了眼往窗户外头瞧,太阳光就越晃眼,晃得她一个劲流眼泪。她用手背使劲在眼上擦,可只要她一抬头,一往窗户外头瞧,眼泪就又流出来。她就这么流了又擦,擦了又流,受好大功夫的罪。其实她知道,就是太阳不晃眼,她也未必看得清厨房那边的情形。可她非看不可。后来过了好大一会儿,她又把眼睛使劲眯成一条缝儿,这才好受了点儿。她手搭个凉篷又望厨房那边瞧。不知道怎么的,她心里怦怦怦直跳,总觉着要出点事儿。可到底能出什么事儿?她也说不上。反正她心跳越来越厉害。她心里直跟自己说:稳住了劲儿,稳住了劲儿。这还挺管事。她到底看清点东西了。她觉得出儿媳妇的身子影儿在厨房里来回晃,可她到底在干什么,还是看不清。她又在心里跟自己说:稳住了劲儿,稳住了劲儿。这一来可到底让她瞧出点毛病来。厨房里的情形就是有点不对头。玉华要是使煤球炉做饭,那她应该在厨房里脸朝南站着,可这会儿她的身子影儿干嘛老往北边晃?七奶奶心里猛地一紧,就好像有人用手攥着她的心死不撒手。她忙着用鼻子使劲吸了几口气,可什么特别的味道也没闻出来。她早听说煤气有股子特殊的味儿,可她闻不出来。还是人老了,鼻子不如年轻时候灵了。不成,她不能这么干坐着。她得想法子把厨房里的情形再看清楚点儿,不行就赶快叫人。她还得往床边挪挪身子。刚才虽说没挪动,她还得再试试。她吸足了一口气,又把上半身使劲儿探出去,再伸出两只胳膊扒住床沿,死命把下半身往床边挪。这回她觉得有门。她憋着一口气。她觉着这口气无论如何不能松,就得趁这口气挪到床边去。没想她刚觉得两条腿有点动了,一阵咳嗽又翻肠倒肚地逼了上来。可这回她没松手。她的两只手还死命地扒着床沿。她就一个心思——死了也得把厨房那边的情形看个明白。

 

 (选自《北京文学》1982年第8期)

 

(1) Sipailou (四牌楼) : portes à arcades qui marquaient autrefois l’entrée d’une rue, d’un quartier, et a fini, dans certaines villes, par désigner tout le quartier.

 

 



 

 

 

 

 

     

 

 

 

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