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Ma Shitu
马识途
Présentation
par Brigitte Duzan, 4 janvier 2017
Bien qu’étant l’un des écrivains (et calligraphes)
les plus renommés du Sichuan, avec
Ba Jin (巴金),
Guo Moruo (郭沫若),
He Qifang (何其芳),
et autres, Ma Shitu n’aurait sans doute guère vu sa
renommée dépasser les frontières de la province si
Jiang Wen (姜文)
n’avait eu l’idée d’adapter au cinéma l’un de ses
romans et n’en avait fait un film qui eut incroyable
succès au box-office à sa sortie en 2010 : « Let the
Bullets Fly » (《让子弹飞》)
.
Un écrivain du Sichuan
De son vrai nom Ma Qianhe (马千禾)
,
Ma Shitu
est né en janvier 1915 dans une famille de lettrés à
Zhongxian, dans le Sichuan (四川忠县),
aujourd’hui un district de Chongqing.
Engagement politique |
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Ma Shitu |
En 1935, il participe au mouvement dit « du 9 décembre » ("一二·九”运动"),
une protestation de masse menée par des étudiants de ce qui
était alors Beiping, soutenue par les étudiants de tout le pays,
pour exiger du gouvernement nationaliste qu’il combatte plus
activement l’agression japonaise. Il devient membre du Parti
communiste en 1938, et à partir de là, il participe aux
activités clandestines du Parti.
Ma Shitu pendant la guerre (à genoux,
2ème rang, à g.) |
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En 1941, il est admis dans le département de chinois
de l’Université du Sud-ouest à Kunming (昆明西南联大).
Il obtient son diplôme en 1945 et devient alors
secrétaire du Comité spécial du Parti pour l’Ouest
du Hubei (鄂西特委).
En juin 1950, il devient membre du Conseil municipal
de la ville de Chengdu, puis, en novembre 1952, du
Comité |
du Parti de la province du Sichuan, et continue de gravir
les échelons. Mais, en juin 1967, il est attaqué à cause
d’une pièce de théâtre et exclu du Parti. Il est réhabilité
en 1979 et nommé vice-président du Comité du Parti pour le
Sichuan ; il n’a cessé depuis lors d’occuper des fonctions
politiques importantes au niveau de la province.
Ecrivain prolifique
Parallèlement, il commence à publier en 1935, sous
l’influence de
Lu Xun. Cette
année-là, à l’âge de vingt ans, il participe à un
concours littéraire organisé par
Ye Shengtao (叶圣陶)
et il obtient un prix.
Il commence par écrire des nouvelles courtes, dont
il publie plusieurs recueils dans les années 1950.
Puis, en 1961, il écrit son premier roman, « Les
chants des Zhuang sur la rivière Qing » (《清江壮歌》),
qui connaît un immense succès. Mais il ne s’est pas
borné à la fiction, il a aussi écrit des recueils
d’essais, des écrits de voyage, des poèmes…
En 1985, à l’âge de 70 ans, il apprend à se servir
d’un ordinateur et devient l’écrivain chinois le
plus âgé à écrire sur ordinateur. Dix-sept ans plus
tard, à l’âge de 87 ans, il écrit un long scénario
pour une série télévisée, « Une guerre sans
flammes » (《没有硝烟的战线》),
publié en 2011. |
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Dix histoires contées dans la nuit |
Réédition du livre après la sortie du
film |
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En 2005, pour ses 90 ans, les Editions des lettres
et des arts du Sichuan ont publié ses œuvres
complètes (《马识途文集》) :
douze volumes au total. Mais il est aussi un
calligraphe réputé, et, l’année précédente, il avait
aussi publié un recueil de ses calligraphies (《马识途书法集》).
Ses récits relatent ce que lui-même a vécu, pendant
la période révolutionnaire et la guerre, puis la vie
sous le régime communiste ; ils sont vivants, avec
des intrigues bien campées, une expression
relativement simple, mais un humour toujours vif,
entre les lignes, qui traduit l’esprit populaire.
Ce sont ces caractères que l’on retrouve dans le
roman dont Jiang Wen a adapté un épisode, le second
de Ma Shitu : « Dix récits contés dans la nuit » (《夜谭十记》).
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Dix récits contés dans la nuit
Le roman est en fait une suite de dix histoires. Il
a été écrit en 1942, au moment où Ma Shitu était à
Kunming, et menait depuis plusieurs années une
existence de révolutionnaire et membre clandestin du
Parti. Ces activités le mettaient en contact avec de
nombreuses personnes, très différentes, qui lui
racontaient des histoires tout aussi variées. Il a
donc décidé de les écrire et a sélectionné dix de
celles qu’il préférait. |
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Le dignitaire bandit en BD |
Une page de la BD |
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Malheureusement, dans le chaos de l’époque, il a été
obligé de les réécrire trois fois car le manuscrit a
été détruit trois fois. Au total, il a mis quarante
ans à achever le livre qui n’a été publié qu’en
1983.
Les dix récits sont de longueur différente, et sont
présentés comme des histoires racontées par dix
petits fonctionnaires qui se relaient pour les
raconter. Ils représentent un tableau très vivant de
la vie dans les villes et villages autour de
Chongqing pendant les années 1930-1940, c’est-à-dire
pendant la guerre |
antijaponaise, et contient une série d’événements intervenus
pendant cette période. Ce sont en fait des anecdotes
amusantes, contées dans un style vivant et plein d’humour.
Les dix récits sont : La ville détruite (破城记),
Remboursement (报销记),
Le dignitaire bandit (盗官记),
Prendre une concubine (娶妾记),
Interdiction de fumer (de l’opium) (禁烟记),
Couler (沉河记),
Vengeance (亲仇记),
Admirer les fleurs (观花记),
Vendre le bétail (买牛记),
Claquettes (踢踏记).
Le film de Jiang Wen est adapté du troisième récit :
Le dignitaire bandit (盗官记).
Il se passe, comme les autres, pendant la période
1930-1940, dans l’ouest du Sichuan. Zhang Mazi (张麻子),
dit Wang Da Mazi, ou le vérolé (王大麻子),
est un bandit téméraire, mais |
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Ma Shitu lors de la sortie du film
“Let the Bullets Fly”,
avec de dr. à g. Carina Lau, Jiang Wen et Zhou Yun |
d’honneur ; il découvre par hasard que le gouvernement vend
des postes, et décide d’acheter un poste
Inauguration d’une exposition de ses
calligraphies
pour son centième anniversaire (avec
Tie Ning à dr.) |
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de magistrat de district car il veut en profiter
pour se venger d’un propriétaire foncier qui a tué
sa famille. Avec l’aide d’un employé du yamen, il
réussit à camoufler son identité et Zhang Mazi
devient Zhang Muzhi (张牧之).
A partir de là s’enchaînent les quiproquos et
situations imprévues…
Jiang Wen a repris l’humour de la narration
initiale, et l’a même développé, avec l’aide des
acteurs, ce qui est la source principale du succès
du film. |
En fait, cependant, le sens et le ton du récit de Ma
Shitu sont légèrement différents : un jeune garçon
voit sa famille détruite par un despote local ; il
grandit seul, devient un hors la loi qui vole les
riches pour donner aux pauvres, et finit par se
venger. Mais à la fin, Zhang Muzhi est blessé. Le
ton est satirique et le récit a pourbutde dénoncer
la corruption et la collusion entre officiels et
banditisme local. |
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Journée d’étude sur Ma Shitu en
janvier 2012 |
Calligraphies |
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Ma Shitu a expliqué : à cette époque, beaucoup de
bandits (土匪)
étaient des pauvres gens qui ont été poussés au
banditisme par la pauvreté, c’était leur seul moyen
de survie. Beaucoup ont ensuite été recrutés dans
les rangs de la révolution. Il y avait beaucoup de
trafics de postes et le parc de Chengdu était
l’endroit où se faisait ce trafic.
Ma Shitu avait 96 ans à la sortie du film, mais bon
pied bon œil. Il a composé un poème pour l’occasion
et l’a offert à Jiang Wen en souvenir…
Le film gagne beaucoup à être apprécié en regard de
l’œuvre originelle qui a eu beaucoup de succès au
début des années 1980, quand elle a été publiée, au
point qu’elle a même été adaptée en
lianhuanhua
.
Mais le film a eu un tel impact sur la notoriété de
l’auteur qu’une journée d’étude a été organisée en
2012 autour de deux de ses écrits, avec les grands
noms de la littérature chinoise, Wang Meng en tête. |
A lire en complément
L’analyse comparée du film et du roman
(à venir sur chinesemovies)
Principales publications
Recueils de nouvelles
1978 A la recherche de l’Armée rouge
《找红军》
1982 Nouvelles moyennes
《三战华园》(中篇小说)
1984 Sélection de nouvelles courtes
《马识途短篇小说选》
1996 Recueil de nouvelles satiriques
《马识途讽刺小说集》
Romans
1966 Les chants des Zhuang sur la rivière Qing 《清江壮歌》
1983 Dix récits contés dans la nuit
《夜谭十记》
1986 L’héroïne de Bashu
《巴蜀女杰》
1986 Elle, une étoile filante scintillante
《她,一颗闪光的流星》
1987 Récits contés dans la splendeur nocturne de la capitale
《京华夜谭》
1992 La légende du dieu de la foudre
《雷神传奇》
Recueils d’essais
散文集/笔记
1981 Notes sur le voyage à l’ouest
《西游散记》
1987 Dans la clandestinité
《在地下(地下党工作总结)》
1994 Menus propos sur l’âge d’or
《盛世微言》(杂文集)
1999 Dix ans de bouleversements
《沧桑十年》
2011 Notes sur l’école du Parti
《党校笔记》
Sur le film, voir chinesemovies (à venir)
Elle a aussi été adaptée une première fois au cinéma en
1986, par un cinéaste de l’Armée populaire de
Libération, Li Hua (李华).
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