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Bao Shi 鲍十
Présentation
par Brigitte Duzan, 15 mai 2013
Bao Shi (鲍十)
est l’un de ces rares auteurs à avoir vu
un de ses écrits
adapté avec succès au cinéma, par un grand
cinéaste, sans que son œuvre fasse aussitôt l’objet d’un
intérêt circonstanciel, au moins de la part des
éditeurs.
C’est en effet
d’une nouvelle de cet écrivain qu’est inspiré le film de
Zhang Yimou (张艺谋)
sorti à l’automne 1999 : « The Road Home » (《我的父亲母亲》).
Le film a obtenu en 2000
l’Ours d’argent et le prix du
jury œcuménique au festival de Berlin, avant de glaner
bien d’autres prix dans des festivals ultérieurs (1) ;
Bao Shi est pourtant toujours aussi peu connu, et aussi
peu traduit. Si on lui demande quel impact a eu le film
sur sa vie et son œuvre, il répond : « Aucun » (“没什么影响。”)
Surnommé « l’écrivain des petites gens » (“平民作家”),
il est à découvrir. |
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Bao Shi |
Lente maturation
Bao Shi avec son chien devant sa
bibliothèque |
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Initialement
prénommé Yuxue (玉学),
Bao Shi est né en 1959 dans la ville de Zhaodong, à une
soixantaine de kilomètres au nord-ouest de Harbin, dans
le Heilongjiang (黑龙江省肇东市).
Fils de paysan,
il s’est passionné pour la lecture dès son enfance. A
l’école, avec un bagage minime de caractères, il a
commencé à lire des textes dans des revues, puis des
« classiques rouges » (1), des romans de wuxia et
des biographies
d’hommes célèbres. |
Bien que
populaires, ces livres n’étaient cependant pas courants
dans le village. Bao Shi se souvient qu’il lui fallait
se débrouiller pour s’en faire prêter ; c’étaient en
général des livres tout abîmés, auxquels il manquait
parfois la couverture, et même des pages.
En 1975, il
parvient à terminer ses études secondaires, mais doit
revenir au village. Il y reste pendant trois ans, mais
considère que, l’un dans l’autre, il ne s’en est pas mal
sorti. Il n’a été paysan qu’une année, puis a été
embauché comme magasinier de son équipe de production,
poste qui avait un avantage principal : il donnait le
droit de s’abonner à des revues. Alors il s’est abonné à
« Littérature du peuple » (《人民文学》),
à la revue « Lettres et arts du Heilongjiang », et
d’autres encore.
En 1978, à la
réouverture des universités après la Révolution
culturelle, il réussit le concours d’entrée à l’école
des |
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Recueil de ses meilleures nouvelles
de la période 1989-2006 |
Baizhuang |
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Beaux-Arts de
Harbin et y étudie pendant cinq ans, dans la section
« écriture de
scénarios ». Ce fut en même temps la période pendant
laquelle il a été le plus assidu à la lecture. A
l’époque, l’école n’avait pas encore de bibliothèque, il
y avait seulement une salle d’archives et une salle de
lecture dont la garde était assurée par une vieille
femme avec laquelle il s’entendait très bien et qui lui
confiait les clés. Il a ainsi pu lire tous les romans,
chinois et étrangers, qui étaient conservés là.
Il en a gardé
une passion pour les livres. Quant il a commencé à
travailler, au début des années 1980, il gagnait une
quarantaine de yuans par mois et les trois quarts
étaient consacrés à l’achat de livres. La seule chose
qui l’arrête aujourd’hui, c’est le manque de place.
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Ecrivain des
petites gens
Il a commencé à
écrire en 1989, tout en travaillant, d’abord comme
professeur de collège, puis comme rédacteur dans une
revue littéraire.
A la
campagne, dans le Dongbei
De toutes ses
lectures, il a retiré un modèle :
Wang Zengqi (汪曾祺).
C’est le premier auteur qu’il a aimé, après avoir lu
« Galettes au beurre » (《黄油烙饼》),
une courte nouvelle à la fois simple et émouvante, qui
raconte les souvenirs que conserve un enfant de sa
grand-mère morte de faim pendant la Grande Famine, mais
sans jamais appuyer sur les détails, en gardant
l’approche distanciée du regard de l’enfant.
Bao Shi s’est
fixé le même objectif que son maître : rester éloigné
des grands mouvements littéraires et des modes, et
décrire de manière aussi réaliste et simple que possible
la vie |
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Mon père ma mère |
Années fastes |
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des gens du
peuple autour de lui, et d’abord au village. Ses
premières nouvelles ont pour cadre la vie à la campagne,
dans le nord-est.
C’est le cas
de la nouvelle "moyenne" (中篇小说),
publiée début 1998 dans la revue « Ecrivains de Chine »
(《中国作家》)
dont le scénario du film « The Road Home » (《我的父亲母亲》)
est adapté, par Bao Shi lui-même. Intitulée « Souvenir »
(《纪念》),
c’est l’histoire simple, à la Wang Zengqi, de l’amour
très pur d’une jeune villageoise pour le jeune
instituteur envoyé créer une école dans son village en
1957. La nouvelle souligne l’amour du jeune homme pour
son métier, autant que pour la jeune Zhao Di (招弟) ;
ils communient en fait dans cet amour commun. Quand Bao
Shi a ensuite écrit le scénario, il en a légèrement
changé la perspective, pour faire passer la jeune Zhao
Di au premier plan (1). |
A Canton
En 2003, Bao
Shi a quitté sa région natale pour aller s’installer
dans le sud, à Canton. En 2004, il a occupé un poste de
recherche à l’Institut littéraire
Lu Xun. Devenu écrivain
professionnel, il est aujourd’hui, entre autres,
vice-président de l’association des écrivains de la
ville de Canton, et rédacteur en chef de la revue des
lettres et des arts de la ville.
Le sujet de ses
nouvelles aussi a changé : il s’est peu à peu imprégné
de la vie et de la culture locales. En 2005, il a occupé
un bureau dans le quartier
de Xiguan (西关),
un ancien quartier de Canton "à l’extérieur de la porte
de l’ouest", l’une des trois anciennes portes de la
ville (il n’y en avait pas au nord, où la ville était
entourée de montagnes). C’est l’un des berceaux de la
culture de Lingnan (岭南文化)
qu’il a découverte à l’occasion et à laquelle il
s’intéresse
maintenant
(3). |
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Carte de 1878 montrant le quartier
de Xiguan, à l’extérieur
de la muraille ouest de la ville |
Obsession (édition 2001) |
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Il a écrit une
trilogie de nouvelles qui reflètent son nouvel intérêt :
« la trilogie de Canton » (《广州小说三题》) :
« L’histoire de Lizhi » (《黎芝的故事》),
« Le thé du matin dans le petit parc de l’ouest » (《在小西园饮早茶》)
et « Ting Zaizhou » (《艇仔粥》).
La première est l’histoire d’une veille femme qu’il a
connue, dans la rue Fengyuan, dans le quartier de
Xiguan, qu’il transmet après en avoir été ému, les deux
autres sont des témoignages du même ordre.
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Contes ordinaires |
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En 2008, il a
publié un recueil de « Contes ordinaires » (《平凡的传奇》) qui racontent, en quatorze récits, la vie à Canton dans les 30 années
après l’ouverture. Ecrits dans une langue très simple,
ces récits font ressortir l’inhabituel sous la surface
des choses. Les personnages sont des plus variés, venant
de tous horizons et origines sociales : professeur,
élève, marchand, prostituée, avocat, col blanc et même
chef opérateur. Tous sont arrivés à Canton comme dans
une terre promise, avec un rêve ; certains ont réussi,
d’autres sont encore en train de s’acharner. C’est un
pan de vie locale dévoilé.
Bao Shi
poursuit donc dans la foulée de Wang Zengqi, mais un
Wang Zengqi tombé amoureux de Canton et du Lingnan.
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Notes
(1) Sur Zhang Yimou (à
venir)
Sur « The Road Home » (à
venir)
(2) Les « classiques
rouges » (红色经典)
sont des petits livres illustrés très en vogue pendant les
trente premières années de la République populaire. Leur origine
remonte à la dynastie des Han, mais c’est dans les années 1950
qu’ils ont connu leur âge d’or, sous l’instigation du président
Mao qui y voyait le meilleur moyen d’instruire les 400 millions
d’illettrés que comptait le pays. A une époque de pauvreté et
d'isolement, les livres illustrés furent une source majeure de
connaissances. Les titres et les sujets se sont renouvelés dans
les années 1990, avec des livres sur l’histoire de la Chine
moderne, du Parti et de la révolution. Ils sont aujourd’hui
destinés en priorité aux enfants des écoles.
(3) Lǐngnán,
c’est-à-dire la région « au sud des chaînes de montagnes »,
englobant Guangdong, Guangxi, Hunan, Jiangxi et Nord Vietnam.
Un grand nombre de
nouvelles récentes sont sur son blog, intitulé « Mon jardin
littéraire » (我的文学园地)
:
http://baoshi2231.blog.163.com/
Principales œuvres
publiées
- Nouvelles courtes et
moyennes
中短篇小说
1998 Souvenir
《纪念》
(中国作家)
1999 Baizhuang, recueil
de nouvelles《拜庄》(北方文艺出版社)
1999 Mon père ma mère《我的父亲母亲》(中国文联出版社)
[scénario
adapté de la nouvelle Souvenir]
2006 Le bruit des
tournesols qui fleurissent, sélection de nouvelles de la période
1989-2006
《葵花开放的声音——鲍十小说自选集
1989--2006》(百花文艺出版社)
2008 Contes ordinaires
《平凡的传奇》(花城出版社)
- Romans
长篇小说
2000 Obsession《痴迷》(北方文艺出版社)
2002 Années fastes《好运之年》(百花文艺出版社)
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