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Le prix Emile Guimet 2020 décerné à Funérailles molles
par Brigitte Duzan, 26 janvier 2021
Le samedi 23 janvier, le prix Emile
Guimet de littérature asiatique 2020 a été décerné à Fang
Fang pour son roman Funérailles
molles traduit par Brigitte
Duzan et publié aux éditions de
l'Asiathèque.
Le livre a suscité une vive controverse
en Chine.
« Funérailles molles » (《软埋》)
aborde en effet un sujet toujours tabou en Chine car
c’est l’un des fondements du régime : la Réforme agraire
de 1950. À partir de l’histoire personnelle que lui a
contée un ami,
Fang Fang a
subtilement construit son récit autour d’un double fil
narratif : les recherches effectuées par un jeune homme
pour tenter de comprendre le passé de sa mère, et les
souvenirs de la vieille dame devenue amnésique, imaginés
par l’auteure. |
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Avec
sa double narration, entre une quête ménageant son lot de
suspense, et des souvenirs qui remontent en dix-huit niveaux
comme ceux de l’enfer taoïste, le roman est un formidable
exemple de l’art narratif de Fang Fang. Mais c’est aussi un
retour sur l’histoire, à l’encontre de la légende dorée
affabulée par le pouvoir : chez Fang Fang, personne n’est tout à
fait bon ni tout à fait mauvais, ni les propriétaires terriens
ni les paysans. Et c’est bien là ce qui a fait hurler ses
détracteurs. D’autant plus que Fang Fang pose en fait le
problème de la mémoire, sur lequel elle conclut : contre l’oubli
individuel, quand le souvenir est trop douloureux, il revient à
l’écrivain de préserver la mémoire du passé. Sujet aussi tabou
que celui de la Réforme agraire.
Le livre ayant été retiré de la vente en Chine,
« Funérailles molles »
n’est actuellement disponible dans le monde que
dans deux éditions : celle de Taiwan et la traduction française…
Le prix vient à point pour le mettre à l’honneur. Présidé par
Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la Culture et de la
Communication, le jury était composé de l’écrivain et essayiste
Pascal Bruckner, du délégué général du Syndicat de la Librairie
française Guillaume Husson, de la traductrice Mathilde
Tamae-Bouhon et de Sophie Makariou, présidente du Musée national
des arts asiatiques – Guimet.
C’est la quatrième édition du prix Emile Guimet,
lancé en 2017 :
https://www.guimet.fr/prix-litteraire/
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