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Báixiāng rén 白相人 : fils à papa, et par extension bon à rien

par Brigitte Duzan, 2 novembre 2019, actualisé 18 novembre 2019

 

Lu Wenfu (陆文夫), « Nid d’hommes » 《人之窝》chap. 8

 

La « grosse belle-sœur du n° 2 » (住在二号门里的胖阿嫂) est dépeinte comme « báixiāng rén sǎosǎo » (白相人嫂嫂), c’est-à-dire une femme ayant un accent de voyou (就是一种带有流氓腔调的女人) explique Lu Wenfu.

 

白相人 báixiāng rén : 含贬义的意思,跟花花公子意思一样。多指无所事事的人,

Terme du dialecte de Shanghai à sens péjoratif, synonyme de fils à papa (花花公子), 白相 báixiāng étant synonyme de 玩耍 wánshuǎ, s’amuser.

 

Pourquoi 白相 báixiāng ? xiāng est à prendre au sens de regarder, et bái au sens de gratuitement. L’expression vient de 看白戏 kàn bái regarder (une pièce de théâtre) gratuitement, et par extension 白相相  bái xiāngxiāng aller dans un endroit où l’on n’a pas à payer de billet d’entrée, pour passer le temps et se distraire.

 

báixiāng rén, une caricature

 

Exemple :

“阿拉到城隍庙去白相相。”  Aller faire un tour au temple de la ville

                                 (白相相 : l’entrée est gratuite 不卖门票) [1]

 

A l’origine, les báixiāng rén étaient des fils de propriétaires ou de commerçants qui vivaient des rentes ou des loyers des biens de la famille (留有几处房产可用来收租的), sans avoir besoin d’exercer un quelconque métier. Leur journée commençait à la maison de thé, se poursuivait aux bains, et le soir ils allaient à l’opéra ou jouaient jusque tard dans la nuit. Mais ce n’étaient pas des petits voyous extorquant de l’argent (区别于同在街面上混的小混混). Sans en avoir beaucoup, ils vivaient de leurs rentes en jouissant de la vie, en s’amusant avec leur cercle d’amis.

  

Le terme s’applique aussi aux femmes, dans ce cas elles sont désignées du terme 白相嫂 báixiāng sǎo, comme dans le roman de Lu Wenfu, où sǎo est juste dialectal, sans référence à un quelconque lien familial.

 

Après la « Libération », dans la Chine maoïste, ces personnages liés à un mode de vie traditionnel ont été considérés comme la lie du peuple : oisifs et indolents, sans profession, on en a fait des bons à rien, des voyous (无业游民,流氓).

 

Ils allaient à l’encontre des slogans de l’époque qui mettaient l’accent sur la valeur du travail :

"劳动光荣" láodòng guāngróng   honneur et gloire au travail ! [2]

"做一个自食其力的劳动者" zuò yí ge zìshíqílì de láodòngzhě   gagner son pain à la sueur de son front

"不做寄生虫" bù zuò jìshēng chóng   ne soyez pas un parasite !

 

"劳动光荣" láodòng guāngróng   honneur et gloire au travail !

 

La « Grosse Belle-Sœur » du roman de Lu Wenfu entre dans cette catégorie des báixiāng rén parasites, avec un sens doublement péjoratif : oisive et à l’affût des commérages, elle a un certain pouvoir de nuisance, mais elle est en outre une ancienne prostituée. Son nom d’Orchidée blanche - 白兰花 ilánhuā - est aussi à prendre comme un jeu de mots.

 

 

 

 


[1] Voir explications détaillées sur les différentes significations et leur évolution : http://blog.sina.com.cn/s/blog_6281c1d70102wkad.html

[2] Slogan qui a été repris et élargi dans le cadre du projet de « rêve chinois » (中国梦) du président Xi Jinping, en particulier dans son allocution du 30 avril 2019, pour la Fête du Travail :

拼搏逐梦,劳动光荣 pīnbó zhúmèng, láodòng guāngróng  

Travaillez dur pour réaliser vos rêves, gloire au travail !

 

 

 

     

 

 

 

 

 

 

 

     

 

 

 

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