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Xu Xing
徐星
Présentation
par Brigitte Duzan, 20 mai 2016
Xu Xing a
été l’un des écrivains « iconiques » de la Chine des
années 1980, exilé en Allemagne pour
avoir participé aux événements de Tian’anmen en
1989, ce qui n’a fait que renforcer son aura
d’écrivain « maudit » dont on a beaucoup parlé.
Après son retour en Chine en 1993, il s’est consacré
à un thème quasiment unique : témoigner des victimes anonymes
de la Révolution culturelle. Et il a choisi de le
faire à travers le documentaire.
Liberté
d’abord
Xu Xing est
né à Pékin en 1956, et il avait donc dix ans au
début de la Révolution culturelle, qui l’a
particulièrement affecté.
Les
traumatismes de la Révolution culturelle |
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Xu Xing |
En
effet, ses parents ont été tous les deux déportés en 1967 : son
père a été interné dans un camp au Hebei, et sa mère envoyée
dans les montagnes du Gansu. Comme beaucoup d’autres enfants à
l’époque, Xu Xing s’est donc retrouvé seul à Pékin à l’âge de
onze ans
,
nourri par un voisin qui tenait un petit restaurant et auquel sa
mère avait promis d’envoyer une partie de ce qu’elle gagnerait
pour qu’il s’occupe de son fils.
Tous les ans, ensuite, il a fait le voyage au Gansu, comme un
pèlerinage, pour aller voir sa mère. Sa scolarité, dans ces
conditions, a été plutôt erratique.
A
seize ans, en 1972, tombé amoureux, il s’épanche dans une lettre
où il racontait ses voyages, mais exprimait aussi son amertume
et ses doutes sur la Révolution culturelle. Effrayée,
l’étudiante montre la lettre à son professeur d’éducation
politique, et Xu Xing écope d’une peine de quarante jours de
prison.
C’est à cet incident traumatisant qu’il fait allusion de façon
cryptique dans l’interview publiée à la fin du recueil « Et tout
ce qui reste est pour toi » quand il dit :
“
我从小不是好学生,乖孩子,十六岁时成了不良少年。”
:
« Je n’ai jamais été ni un bon élève, ni un enfant sage, et à
seize ans je suis devenu un jeune à problème. »
Il est revenu sur cet épisode marquant de sa vie une trentaine
d’année plus tard, dans son documentaire « Ma Révolution
Culturelle ». Il a raconté la suite : l’ancienne étudiante à
laquelle était destinée la lettre a vu le documentaire, aux
Etats-Unis où elle s’était installée ; elle est rentrée en
Chine, pour rencontrer Xu Xing, et lui exprimer ses regrets…
Les années 1980 et
après
Il parvient quand même à terminer ses études
secondaires en 1975. Il est alors envoyé travailler
dans le nord du Shaanxi. En 1977, il s’enrôle dans
l’armée, et sert dans le Gansu et le Shaanxi, avant
d’être démobilisé en 1981. Il rentre alors à Pékin
où il est affecté à un restaurant de canard laqué,
comme serveur puis nettoyeur.
Variations sans thème, édition 1989
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C’est aussi en 1981 qu’il commence à écrire. Son
premier récit, le désormais célèbre« Variationssans
thème » (《无主题变奏》),
circule d’abord sous le manteau, dans les cercles du
Conservatoire supérieur de Musique, de l’Institut
d’Art dramatique et de celui du Cinéma. Et un jour
de 1985 (parce qu’il avait trop bu, dit-il), Xu Xing
prend son vélo et porte le manuscrit à la revue
Littérature du peuple (人民文学),
dont le rédacteur en chef était alors
Wang Meng (王蒙).
Après quelques révisions, le manuscrit est publié,
en juillet 1985, et déclenche illico débats,
controverses et critiques. Entre-temps, Xu Xing
était devenu un centre d’attraction qui attirait au
restaurant nombre de gens venus pour discuter avec
lui plus que pour les canards laqués. Accusé de
troubler la bonne marche de l’établissement, Xu Xing
a préféré démissionner.
Il se retrouve sans emploi, travaillant
occasionnellement à la rédaction du Monde des
Chinois (Huaren
shijie 《华人世界》)
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et de l’Institut Lu Xun. Mais il y a gagné la liberté ; il
multiplie ensuite les publications de récits dans diverses
revues.
En même temps, en 1986, il commence un doctorat à
l’Université normale de Pékin et à l’Institut Lu
Xun. Il obtient son diplôme en 1989. Mais il
participe à l’agitation estudiantine du printemps,
et, après les événements de la place Tian’anmen,
prendra le chemin de l'étranger, l'Allemagne en
l'occurrence.
Fêté, traduit et célébré, pour son engagement autant
que ses écrits,
il remporte
en 1991 le prix Kurt Tucholsky de Pen International.
En 1995, il est sélectionné par le Nouvel
Observateur comme
l'un des 240 meilleurs écrivains dans le monde.
Il est même nommé, en 2003, chevalier de l’Ordre des
Arts et des Lettres.
Mais entre-temps, en 1993, il est rentré à Pékin.
Croisade solitaire
Xu Xing
s’est
attaché depuis lors à préserver cette liberté
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Et tout ce qui reste est pour toi,
édition août 2004 |
conquise au prix du confort de sa vie matérielle. On
l’a qualifié de sanwu (三无),
le « triple sans », sans travail, sans assurance
sociale et sans logis – ce dernier point n’étant
plus vrai depuis 2012 : il a hérité de la maison
familiale après la mort de ses parents. Mais il
reste farouchement solitaire.
En dialogue avec Feng Tang, en mai
2014 |
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Cette
solitude est, depuis son retour à Pékin, consacrée à
un thème dominant, sinon unique : la Révolution
culturelle, cette « longue cicatrice sur le visage
de la Chine » dont il faut cultiver le souvenir
avant qu’elle ne s’efface. Il a commencé par faire
des photos, puis est passé au documentaire : j’aurai
tout le temps pour écrire des romans quand j’aurai
quatre-vingts ans, a-t-il dit. L’image apparaît
aussi comme le meilleur mode de catharsis.
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Après quelques
vidéos pour la télévision, il a d’abord réalisé un documentaire
sur une femme spécialiste de papiers découpés traditionnels,
aujourd’hui très âgée, qu’il a connue pendant la Révolution
culturelle, pendant les deux années de son séjour au Shaanxi, où
il est revenu en 2002.
Il a
ensuite réalisé trois documentaires : l’un, en 2007,
sur l’histoire de sa lettre et de ses conséquences,
l’autre, coréalisé avec Andrea Cavazzuti, sur un
chauffeur de taxi originaire de Songzhuang, le
quartier d’artistes de la banlieue de Pékin
(sous-titré « vie dans une colonie d’artistes vue
par un chauffeur de taxi »), et le troisième, achevé
en 2014, sur des victimes méconnues de la Révolution
culturelle, en l’occurrence des paysans du Zhejiang. |
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Avec Liu Sola |
Il
est généralement considéré comme un personnage hors pair.
Voir en complément sur chinesemovies :
Xu Xing documentariste.
Principales
publications
Juillet 1985 Variations sans thème 《无主题变奏》(《人民文学》)
Janvier 1986 Les rats affamés 《饥饿的老鼠》、Aide
《帮忙》(《收获》)
Avril 1986 Une histoire de la ville
《城市的故事》(《中国文学》)
Décembre 1986 Mort pour une juste cause
《殉道者》、Là où nos
chemins bifurquent 《无为在歧路》(《人民文学》)
Février 1989 Histoire d’amour 《爱情故事》(《中外文学》,réédité
juillet 1989《上海文学》…)
Janvier 1992 Comment je suis tombé malade
《我是怎样发疯的》(《今天》)
Mars 1992 La ville où il n’y a plus de chansons
《失去了歌声的城市》(《今天》)
Avril 1992 (scénario) L’histoire du roi et du cheval
《国王和马的故事》(剧本《今天》)
Mai 1992 (scénario) 《一出戏是怎样完成的……》(剧本《今天》)
Août 2004 Et tout ce qui reste est pour toi
《剩下的都属于你》(《长江文艺出版社》)
Traductions en français
Par
Sylvie Gentil
Le Crabe
à lunettes, L’Atelier
Julliard, 1992
(première traduction de Variations sans thème)
Et tout ce qui reste est pour toi, L’Olivier, 2003
Variations sans thème, L’Olivier, 2004.
(recueil qui comporte en outre : Une histoire de la ville / Là
où nos routes bifurquent / Les rats affamés / Et tout ce qui
reste est pour toi)
Nouvelle inédite, le Monde diplomatique, août 2002 (pp. 24-25) :
Les tribulations d’un paysan chinois
Début :
http://www.monde-diplomatique.fr/2002/08/XU/16787
Documentaires
?? La prisonnière peintre 《画囚》
2007 Ma Révolution culturelle 《我的文革编年史》
2013 5+5 《五加五》
avec Andrea
Cavazzuti
2014 Summary of Crimes《罪行摘要》
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