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Hai Zi 海子

1964-1989

Présentation

par Brigitte Duzan, 6 novembre 2023

 

 

Hai Zi

 

 

Hai Zi est l’un des poètes chinois les plus célèbres des années 1980, influencé à ses débuts par les poètes dits « obscurs » (menglong shiren 朦胧诗人), et en particulier par Yang Lian (杨炼). Son suicide, en mars 1989, peu de temps avant les événements de Tian’anmen, en a fait une figure symbolique, longtemps très populaire auprès des jeunes.

 

Enfant de la mer

 

Son pseudonyme Hai Zi (海子), l’enfant de la mer, est un raccourci de son vrai nom Zha Haisheng (查海生), celui né sur la mer. Il est pourtant né dans un petite village de l’Anhui où ses parents étaient paysans. Mais il était brillant : à la réouverture des universités après la Révolution culturelle, alors qu’il n’a que quinze ans, il est admis en faculté de droit à l’université de Pékin (Beida 北大) ; il en sort diplômé à l’âge de 19 ans, après quoi il devient professeur de droit à l’Université de droit et science politique (中国政法大学) à Pékin.

 

Il commence à écrire des poèmes encore à l’université, en 1982. Deux ans plus tard, il remporte le premier prix du Prix de littérature du 4 mai instauré par le premier Festival d’art de l’université de Pékin pour ses poèmes « Cuivre asiatique » (《亚洲铜》) et « Le soleil d’Arles » (《阿尔的太阳》) qu’il signe pour la première fois de son nom de plume.

 

Fasciné par la culture tibétaine, il a fait plusieurs voyages sur les hauts plateaux tibétains du Qinghai, mais il était aussi empreint de mysticisme, obsédé par la mort, dépressif et en proie à des hallucinations. Il s’est suicidé près de Shanhaiguan en se couchant sur la voie ferrée le 26 mars 1989, peu avant son 25e anniversaire. Dans le sac que l’on a trouvé à côté de lui se trouvaient une Bible, un recueil de nouvelles de Joseph Conrad, « Walden », de Thoreau et « Kon-Tiki » de Thor Heyerdahl.

 

Le 13 janvier précédent, pourtant, il écrivait encore : Dès demain, je m’engage à être un homme heureux …

 

《面朝大海,春暖花开》

Face à la mer, au printemps doux s’ouvrent les fleurs

 

 

Face à la mer

 

 

Dès demain, je m’engage à être un homme heureux :

nourrir les chevaux, fendre le bois, parcourir le monde

dès demain, j’aurai souci du grain et des légumes

je possèderai une maison, face à la mer

au printemps doux s’ouvriront les fleurs

 

Dès demain j’écrirai à mes proches,

je leur dirai mon bonheur

ce que les foudres de cette félicité m’ont dit

à chaque homme je le dirai

 

pour chaque rivière, pour chaque montagne je choisirai

un nom qui tiendra chaud

Etranger ! sur toi aussi je porte ma faveur

je te souhaiterai un avenir éclatant,

que la vie te destine à celle que tu aimes,

qu’en ce monde de poussière tu captures le bonheur

 

pour moi, je veux seulement que face à la mer  

au printemps doux s’ouvrent les fleurs [1]

  

Du poète au mythe

 

Ce suicide à deux mois des manifestations étudiantes soldées par un bain de sang place Tian’anmen a fait de lui un héros romantique et de sa tombe, près de son village natal, un lieu de pèlerinage. Son ami Luo Yihe (骆一禾) est mort peu après, en mai, d’une hémorragie cérébrale, sans atteindre la même célébrité [2]. L’une des sources du culte de Hai Zi est l’ouvrage édité par Cui Weiping (崔卫平) et publié en mars 1999 : « Hai Zi immortel » (不死的海子). Hai Zi y est décrit comme un héros culturel possédant courage et don de prémonition, représentant l’esprit idéaliste des années 1980, en lutte contre une société de plus en plus commercialisée. Il est ainsi érigé en symbole de l’avant-garde de ces années-là, convaincue que leur attitude héroïque était en symbiose avec la marche de l’histoire vers un avenir libéral et éclairé.

 

 

Hai Zi immortel

 

 

Ses poèmes ont commencé à être publiés après sa mort. Ses œuvres complètes ont été éditées en 1997 grâce à son ami le poète Xi Chuan (西川) : elles comprennent non seulement des centaines de poèmes, mais aussi des nouvelles et des pièces de théâtre.

 

Depuis 1993, l’université de Pékin organise un festival annuel de poésie qui porte son nom. En 2001, « Littérature du peuple » lui a décerné le Prix national de poésie à titre posthume et ses poèmes ont été introduits dans les manuels scolaires à partir de 2003. Dans l’ Histoire de la poésie nouvelle chinoise contemporaine (《中国当代新诗史》) du professeur Hong Zicheng (洪子诚) [3], Hai Zi est cité parmi les quatre plus importants poètes postérieurs au courant de la « poésie obscure » avec Han Dong (韩东), Yu Jian (于坚) et la poétesse Zhai Yongming (翟永明). 

 


 

Œuvre

 

250 poèmes courts

 

Poèmes longs 长诗

Légende 《传说》

La rivière 《河流》

Ls soleil. Dazhasa 《太阳·大扎撒

(long poème inachevé que Xi Chuan a rattaché aux Sept livres du soleil)

 

Théâtre 诗剧

Mais l’eau, l’eau 《但是水、水》 (trilogie 三幕诗剧)

Les sept livres du soleil 《太阳七部书》

 

Histoires mystérieuses 神秘故事

Six histoires mystérieuses (Le roi des tortues, Le bateau de bois, Premier amour, Le coq, Naissance et Sud) 《神秘故事六篇》(龟王、木船、初恋、公鸡、诞生、南方)

 


 

Traductions de poèmes en français

 

- A la déesse miséricorde de mon cou, trad. Romain Graziani*, barapoemes.net,‎ juillet 2023.

- Maison (1985), trad. Romain Graziani*, barapoemes.net,‎ juin 2022.

- Le Cygne (1986), trad. Chantal Chen-Andro*, barapoemes.net,‎ juillet 2021.

- Tes mains (1985), trad. Romain Graziani*, barapoemes.net,‎ juillet 2020.

- Emouvoir (1986), trad. Chantal Chen-Andro*, barapoemes.net,‎ juillet 2019.

- Face à la mer (13 janvier 1989), trad. Chantal Chen-Andro*, barapoemes.net,‎ juillet 2018.

* in Le ciel en fuite : Anthologie de la nouvelle poésie chinoise, éd. Circé, 2004

- Quatre poèmes, trad. Zhang Bo et Yves Bergeret, cadrans.org, juillet 2014 :

Hymne à la nuit, dédié à la fille de la nuit《黑夜的献诗——献给黑夜的女儿》

L'automne《秋》, L'interrogatoire《讯问》et La Réponse《答复》.

(Textes chinois et traduction)

 

Et de son ami le poète Shu Cai (树才) : Hai Zi pour toujours / Hai Zi Forever (永远的海子)

(texte chinois et traduction en anglais par Ouyang Yu, in « Poems of Yi Sha, Shu Cai and Yang Xie », Vagabond Press, 2014)

 

 


[2] Voir l’ouvrage de Rui Kunze, Struggle and Symbiosis : The Canonization of the Poet Haizi and Cultural Discourses in Contemporary China, Projekt Verlag, 2012, Review by Sebastian Veg.

[3] Publiée aux presses de l’Université de Pékin en 2010.

 

     

 

 

 

 

     

 

 

 

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