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				« Bonsoir, la rose » de 
				Chi Zijian : poésie, mystère et émotion 
				par Brigitte 
				Duzan, 8 mai 2015, actualisé 11 avril 2019   
					
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						« Bonsoir, 
						la rose » 
						(《晚安玫瑰》) 
						est une nouvelle ‘moyenne’ (中篇小说) 
						de 
						
						
						Chi Zijian (迟子建) 
						qui se lit comme un court roman, initialement publiée 
						dans la revue Littérature du peuple (《人民文学》) 
						en avril 2013.  
						  
						Avec ce récit, 
						Chi Zijian nous entraîne dans l’univers très personnel 
						qui est le sien. Cet univers, c’est le Grand Nord de la 
						Chine, où la romancière est née en 1964, et qui 
						constitue non seulement la toile de fond de ses 
						nouvelles, mais qui en est bien plus le sujet 
						privilégié. Comme elle l’a dit elle-même, si je n’étais 
						pas née dans ce village du Pôle Nord (c’est le nom exact 
						de son village natal : Beiji cun 
						
						北极村), 
						si je n’y avais pas vécu, je ne serais probablement 
						jamais devenue écrivain. 
						
						  
						
						C’est un monde enseveli sous la neige une partie de 
						l’année, aux hivers longs et rigoureux, pendant lesquels 
						il fait bon raconter des histoires au coin du feu. C’est 
						ce que faisait la  |  | 
						
						 
						Bonsoir la rose, édition chinoise |  
						
						grand-mère de Chi Zijian, comme beaucoup d’autres femmes
				du village certainement, et ce sont ces histoires qui ont nourri 
				un imaginaire très riche, au contact de la nature et tout ce 
				qu’elle comporte d’étrange, au contact, aussi, des vieilles 
				coutumes et croyances locales. 
				  
				
				  
				« Bonsoir, 
				la rose » est une émanation directe de cet univers et une 
				illustration de ce que Chi Zijian a écrit de meilleur, mais dans 
				un registre différemment de ses récits précédents : elle 
				s’inscrit en milieu urbain. L’histoire est contée avec un 
				réalisme d’une grande sensibilité, mais possède en même temps 
				une aura de secret caractéristique de la majeure partie de ses 
				nouvelles, ici particulièrement développée car les deux 
				personnages principaux ont leur blessure intime, soigneusement 
				cachée.  
				  
					
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						Bonsoir la rose, traduction en français |  | 
						Ce sont deux 
						femmes, l’une jeune et l’autre déjà âgée, celle-ci 
						hébergeant l’autre qui cherchait une chambre à louer, 
						dans la ville de Harbin qui est celle où vit l’auteur. 
						Elles ne semblent pas faites, a priori, pour 
						s’entendre : la plus jeune travaille dans une agence de 
						presse, l’autre vit dans son passé, joue du piano, prie 
						en hébreu… elle est juive d’origine russe, sa famille a 
						émigré en Chine à la suite de la Révolution d’octobre.
						 
						  
						Mais toutes 
						les deux sont conditionnées par leur passé : la plus 
						jeune, Xiao’e (小娥), 
						est marquée par les circonstances tragiques de sa 
						naissance (que l’on ne précisera pas pour ne pas ruiner 
						la lecture de la nouvelle), l’autre, Lena (莲娜), 
						par ses origines elle aussi, mais d’une autre manière. 
						  
						Il y a 
						beaucoup d’émigrés russes, et juifs, venus de Sibérie au 
						moment de la révolution d’Octobre pour s’installer dans 
						le nord-est de la Chine où ils forment des communautés 
						préservant leur langue, leur culture, leur religion et 
						leurs  |  
						traditions ; 
				mais ils sont rarement pris comme thème de nouvelles. La Lena de
				« Bonsoir, la rose » 
				est un personnage coloré et attachant, cachant un passé 
				douloureux et des trésors de tendresse refoulée. 
				  
				Ce sont finalement 
				deux solitudes qui brisent leur isolement, deux être meurtris 
				qui s’épaulent. On pense au chengyu illustrant l’histoire 
				des deux poissons privés d’eau à cause d’une terrible sécheresse 
				qui tentent de survivre en crachant l’un sur l’autre (xiāng 
				rú yǐ mò 
				/ 
				
				相濡以沫). 
				L’histoire de Chi Zijian a un aspect de fable intemporelle, mais 
				c’est un conte des temps modernes, écrit avec une extrême 
				sensibilité, et une tension affective profondément émouvante.
				 
				  
				Si l’on veut découvrir 
				les nouvelles de Chi Zijian, c’est l’idéal pour commencer. Si on 
				en connaît déjà, on appréciera la subtile beauté de celle-ci
				
				
				
				.
				 
				  
				  
				Bonsoir, la rose, 
				traduit du chinois par Yvonne André, Philippe Picquier, mai 
				2015, 192 p., Picquier poche, mars 2018, 224 p. 
				Extrait de la 
				traduction : 
				
				
				http://www.editions-picquier.com/wp-content/uploads/2018/02/Bonsoir-la-rose-Poche_extrait.pdf
				 
				  
					
					
 
 
						
						
						
						
						Elle a eu beaucoup de succès en Chine et un site qui lui 
						a même été dédié, qui explique le contexte, dépeint les 
						personnages et leur histoire, avec le début du texte et 
						une interview de Chi Zijian :  
						
						
						
						http://book.sina.com.cn/z/wananmeigui/       
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