Pourquoi les monastères taoïstes s’appellent guan
par Brigitte
Duzan, 3 janvier 2022
Si le terme
général utilisé pour les monastères bouddhistes en Chine est
sì
寺
,
les monastères taoïstes sont désignés par le caractère guàn
觀
(simplifié
观).
Le caractère lui-même est la clé permettant de comprendre
pourquoi.
Le caractère
guān
觀
(premier ton) signifie observer. Il a deux composantes :
-
guàn 雚:
une aigrette (l’oiseau)
-
jiàn 見
(simplifié
见)
: percevoir
Le verbe guān
觀s’entend
ainsi comme désignant l’attitude de l’aigrette
observant les
choses à peine visibles, et décelant les présences les plus
infimes cachées autour d’elle.
Le
substantif guàn
觀
désignait à l’origine des tours d’observation, puis des autels à
degrés dédiés aux divinités, que l’on gravissait en se
rapprochant du ciel.
Louguantai |
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Le terme en est venu à désigner les monastères
taoïstes lorsque le taoïsme en a fondé, en se
développant et s’organisant à partir de la fin de la
dynastie des Han, sur le modèle du bouddhisme qui se
développait en même temps en Chine. C’est au début
du 6e siècle que le premier monastère
taoïste a été fondé, dans les monts Zhongnan (终南山)
ou Taiyi (太乙山),
là où Laozi aurait écrit le Daodejing (《道德经》) :
le monastère de Lóuguàn (樓觀/楼观)
ou Lóuguàntái (樓觀臺/楼观台),
construit sur le site d’une ancienne tour
d’observation du ciel que le nom même |
suggère,
tour doublée d’un autel en forme de plateforme pour le culte
des dieux : tái
臺
(simplifié
台).
Les
monastères taoïstes étaient ainsi désignés par un terme
suggérant l’idée de lieux permettant de s’aligner sur le cosmos
et, par méditation interne nèiguàn
内觀/观,
d’explorer
son propre univers interne conçu comme microcosme interne en
interpénétration avec le paysage extérieur. Processus
nécessitant obscurité, silence et réclusion.
Terme qui désignait à l’origine une résidence
officielle, voire le site du gouvernement, avec –
sous-entendue – l’idée de loi.
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