Repères historiques

 
 
 
     

 

 

La littérature chinoise au XXe siècle

IV. Shanghai années 1920 : la ville comme laboratoire, entre littérature et cinéma

par Brigitte Duzan, 14 février 2025

 

Laboratoire littéraire « exotique »

 

Dans un livre publié en 1927, « Ce qui ne s’avoue pas, même à Shanghai, ville de plaisirs », le « sinologue » Georges Soulié de Morant qui fut un temps (de 1903 à 1906) élève-interprète au consulat de la Concession française[1] dépeint la ville ainsi :

  

 

 

 

 

« Cette foule de gens, prisonniers en fuite, hommes d’affaires,

militants politiques, banquiers, étudiants et lettrés, passent leurs journées à clamer à grands cris la nécessité de se battre contre l’oppression de la terreur étrangère, en ajoutant qu’il aurait fallu depuis longtemps récupérer les concessions étrangères – mais espérant en fait que les étrangers ne partent jamais. »

 

 

Soulié faisait lui-même partie de cette « terreur étrangère » et son ironie un rien méprisante est un reflet de la mentalité qui régnait à Shanghai dans les concessions. Un critique d’art nationaliste, à la même époque,  exprime au contraire son admiration pour la civilisation occidentale : « C’est seulement depuis que les étrangers sont arrivés à Shanghai que la ville a des parcs, des rues propres, des grands magasins chic, une saison de concerts d’octobre à mai, des musées et des bibliothèques… Il faut reconnaître que, de toutes les nations, celle qui a la civilisation la plus en avance… c’est l’Europe. »[2]

 

Beaucoup d’artistes et intellectuels chinois à l’époque avaient vécu au Japon, et en avaient rapporté une esthétique nourrie de culture occidentale, le Japon apparaissant comme une vitrine sur le monde occidental, et un modèle de création artistique. Dans ce contexte, c’est la ville qui est le site privilégié et la précondition de l’art moderne. C’est la ville qui offre les « temples » de la civilisation, et la communauté nécessaire, loin de la campagne obscurantiste. Et l’épitome de la ville, c’est Shanghai.

 

Dans ces années 1920, Shanghai était une ville décriée par beaucoup pour n’être plus tout à fait un village mais pas encore vraiment une ville, une ville en devenir ayant perdu les beautés de la campagne sans avoir encore atteint la modernité de la metropolis. Mais c’est justement ce caractère un peu hybride, parce que Shanghai offrait l’image d’une ville qui n’était pas tout à fait la Chine, avec une touche d’exotisme au sens propre de goût pour l’étranger, que cette ville pouvait devenir une laboratoire culturel où pouvait être menée, comme en éprouvette, la restauration et la modernisation de la culture chinoise.

 

Le centre de ce laboratoire, c’était justement la Concession française, et son avenue Joffre (aujourd’hui partie centrale de Huaihai lu, en shanghaien Wahae Lu 淮海路) offrant aux flâneurs et artistes l’image plus ou moins fantasmée d’une avenue des Champs-Elysées miniature[3]. C’est un exotisme un rien sensuel qu’affiche là Shanghai, évoquant l’aspect sulfureux d’Alexandrie dans la « Thaïs » d’Anatole France[4] : « Je te hais, Alexandrie, proclame l’ascète Paphnuce, je te hais pour ta richesse, pour ta science, pour ta douceur et pour ta beauté. Sois maudit, temple des démons ! »

 

Thaïs qu’aimait à citer Zhang Ruogu (张若谷) qui a dépeint Shanghai en termes « exotiques » dans l’un des essais de son recueil « Yiguo qingdiao » (《异国情调》), c’est-à-dire « Exotisme ». Zhang Ruogu avait commencé sa carrière en traduisant et commentant la littérature française, et ses « histoires urbaines » en sont inspirées, mais en y mêlant une culture musicale nourrie de la biographie de Beethoven par Romain Rolland comme de la musique viennoise et de son esprit fin-de-siècle.

 

 

 

Yiguo qingdiao 

 

Lui aussi émanation de la Concession française où il avait passé l’essentiel des années 1898-1902 à apprendre le français, Zhang Ruogu fut le « parrain » des nouveaux salons intellectuels de Shanghai, selon le modèle des salons de l’aristocratie littéraire parisienne, suivi en cela par le préfacier de « Yiguo qingdiao », l’écrivain et éditeur Zeng Pu (曾朴/曾樸) : il habitait une superbe résidence rue Massenet et, avec son fils aîné Zeng Xubai (曾虚白), il ouvrit en 1927 une librairie qui se voulait « salon à la française »  (法式沙龙), nommée Zhen mei shan (真美善), le vrai, le beau et le bien. Avec la revue éponyme doublant la librairie, Zeng Pu se lança alors dans des traductions d’œuvres françaises, des pièces de Victor Hugo et de Molière, mais aussi le roman délicieusement « décadent » de Pierre Louÿs « Aphrodite » qui lança les éditions du Mercure de France en 1896 et inspira son propre roman « Fleur sur l’océan des péchés » (Nie Hai Hua《孽海花》) – superbe métaphore de l’univers chinois qui pourrait aussi bien être celle de Shanghai qui en était le microcosme.

 

Dans le salon de Zeng Pu se croisait le gratin des écrivains et des traducteurs de l’époque, les discussions portaient aussi bien sur les traductions de Lin Shu (林紓) que sur les romans d’Anatole France, de George Sand ou de Loti, et chacun avait son idole. En 1928, Zeng Pu publia sa « Vie littéraire » (Wenxue shenghuo 《文学生活》) sur le modèle de celle d’Anatole France. Il se voyait lui-même comme une réincarnation de Hugo ; lui et son fils Zeng Xubai étaient considérés par ailleurs comme la version shanghaienne d’Alexandre Dumas père et fils.

 

L’autre salon francophile de Shanghai était celui du poète Shao Xunmei (邵洵美), rejeton d’une riche famille de la ville : son père avait été un dandy notoire à Pékin, avant de poursuivre son mode de vie extravagant à Shanghai. Shao Xunmei avait visité l’Italie, étudié à Cambridge et aux Beaux-Arts à Paris, puis à son retour à Shanghai avait fondé la librairie « de la chambre d’or » Jinwu shudian (金屋书店), avec sa revue mensuelle, Jinwu yuekan (金屋月刊). Le but était de publier sa propre poésie « décadente », inspirée par « Les fleurs du mal » de Baudelaire comme l’indique déjà son titre (Hua yiban de zui’e《花一般的罪恶》). Son salon arborait un buste de Sappho qui venait des fouilles de Pompei, et un manuscrit du poète anglais Swinburne qui était son idole.

 

En 1937, il eut une liaison avec la journaliste américaine Emily Hahn qui écrivait pour The New Yorker. Il lui acheta une superbe maison près de l’avenue Joffre, qui fut un autre salon « exotique ». C’est Shao Xunmei qui la mit en liaison avec les sœurs Soong dont elle écrivit la biographie. Il l’introduisit aussi à la pratique de l’opium... Son recueil de nouvelles « Mr Pan », publié en 1942, en regroupe une série écrites pour le New Yorker concernant un certain « Pan Heh-ven » qui était en fait Shao Xunmei. Il est désigné sous le nom de Zau Sinmay dans ses mémoires[5].

 

 

 

Mr. Pan, 1942

 

Mais Shao Xunmei est aussi en filigrane derrière le personnage du « Peng » de la nouvelle de 1929 de Zhang Ruogu « Symphonie urbaine » (Duhui jiaoxiangqu《都会都会交响曲》) : les trois noctambules du récit se retrouvent dans le décor orientaliste du bar Cairo Nights ou du café Renaissance, passent devant les néons du New York Café avant de s’engouffrer dans la semi-obscurité du dancing (japonais) du Trocadéro !

 

Les titres de ce genre ont fleuri, en cette fin des années 1920 : « Histoires d’amours urbaines » (Dushi de nannü 《都市的男女》) de Xu Weinan (徐蔚南) également en 1929, ou « Paysages urbains » (Dushi fengjing xian《都市风景线》) de Liu Na’ou (刘呐鸥) un an plus tard. 

 

Terreau du néosensationnisme

 

Imitation du Japon

 

Ce qui prime, alors, c’est la vitesse et une vision fragmentée, comme de bribes de paysage qui défilent à toute vitesse, comme par la fenêtre d’un train : le néosensationnisme est né du mouvement japonais Shinkankakuha (新感覚派) lancé en 1924 par des jeunes écrivains autour de Kawabata et Yokomitsu, après le tremblement de terre qui a frappé l’île de Honshu le 1er septembre 1923 et déclenché des incendies attisés par le vent d’un typhon concomitant. La catastrophe fut suivie d’un massacre de Coréens et autres étrangers. Les conséquences s’en firent sentir dans les années suivantes, et tout particulièrement dans les écrits de Kawabata.

 

Dans son roman paru en 1930, « Le gang rouge d’Asakusa » (Asakusa Kurenaidan 浅草紅團)[6], il dépeint la vie de toutes jeunes prostituées, et autres personnages surtout féminins en marge de la société, dans ce quartier qui était à Tokyo dans les années 1920 l’équivalent de Montmartre. C’est une narration originale, influencée par le modernisme occidental, qui va à son tour influencer les jeunes écrivains chinois venus étudier dans la capitale japonaise.

 

Frappé depuis son plus jeune âge par la disparition successive de ses parents, de sa sœur, de sa grand-mère, puis de son grand-père devenu aveugle, Kawabata revient constamment dans ses premiers écrits, de 1916 à 1926, sur son rapport quasi obsessionnel à la mort et à la solitude : « L’abonné des funérailles », « Les sentiments d’un orphelin », « Le visage de la morte », « Le Maître des funérailles », etc. Et c’est en septembre 1924 qu’il fonde avec Yokomitsu Riichi et une douzaine d’autres amis la revue d’avant-garde Bungei jidai ou L’époque de la littérature, qui sera la revue du mouvement Shinkankakuha. Kawabata publie l’année suivante dans la revue l’article Shinshin sakka no shinkeikō kaisetsu ou « Notes sur les nouvelles tendances des nouveaux écrivains » : c’est le manifeste du mouvement, en rupture avec la littérature traditionnelle, mais aussi en opposition à la littérature prolétarienne. L’accent est mis sur les « nouvelles sensations », et le modèle cité … Paul Morand : logique des sens plutôt que logique rationnelle.

 

Par ailleurs, Kawabata était passionné de photographie et de cinéma. En 1926, il coécrit un scénario pour le réalisateur et acteur onnagata Kinugasa Teinosuke, pour un film expérimental en noir et blanc qui se passe dans un asile, entre expressionnisme allemand et cinéma muet soviétique : « Une page folle » (Kurutta ippēji). Il est considéré comme le premier film du courant néo-sensationniste[7]. Dans la copie existante, malheureusement, il manque près d'un tiers du film original. En outre, il n’a pas d'intertitres, ce qui le rend difficile à suivre. Dans les années 1920, les projections au Japon comprenaient une narration dans la salle, assurée par un conteur ou benshi, avec une musique d'accompagnement. Le film est considéré de nos jours comme un chef-d’œuvre du cinéma muet mondial.

 

À l’école de Paul Morand

 

On voit que les très courts récits de Kawabata sont proches du montage séquentiel d’un film et de l’écriture scénaristique. C’est ce style très particulier qui a inspiré les néo-sensationnistes chinois, mais sans atteindre à la richesse des thèmes abordés dans son œuvre, ni leur puissance évocatrice dans leur extrême brièveté.

 

Ils adoptent un style syncopé pour traduire la vitesse qui semble être pour eux la caractéristique essentielle de la modernité. Et on retrouve bien là l’influence revendiquée de Paul Morand qui, entre 1921 et 1935, a publié une série de tableaux urbains elliptiques : ce sont des images de wagons-restaurants, d’automobiles vibrant sous l’effet de la vitesse, et toujours de femmes fatales sans scrupules qui semblent nées de cet univers en mouvement constant.

 

Son succès au Japon était dû en grande partie aux traductions de Horiguchi Daigaku (堀口 大学), lui-même poète et traducteur des surréalistes français. C’est sa traduction de la nouvelle « Ouvert la nuit » (Yo hiraku) qui a lancé la mode de Morand[8], d’abord auprès de Yokomitsu Riichi – nouvelle qui est justement son coup d’essai et son coup de maître, où d’emblée, comme le dit si bien Pierre Assouline, « il trouve la note juste : vitesse, densité, brièveté. Pas de gras, une écriture à l’os, un rythme syncopé. » Et justement, il lui faut la forme courte, quand il tente le roman, pourtant titré « L’Homme pressé », il s’embourbe, lui-même se dit trop flemmard pour écrire des sagas. Et tellement imbu de lui-même qu’à sa mort il lègue sa bibliothèque à l’Institut, mais aussi une somme d’argent pour doter un prix Paul Morand ![9]

 

Fréquentant l’aristocratie et les salons, Morand a mené pendant toutes les années 1914-1918 une vie de luxe entre Londres, Rome, Madrid et Paris. Ses nouvelles sont le reflet de sa vie, et de sa passion pour les voitures rapides, les beaux chevaux, et les femmes. Dans les années de l’entre-deux guerres, il a participé à la vie mondaine parisienne en fréquentant les « dîners du samedi » instaurés par Cocteau et son cercle d’amis qui se réunissaient dans le cabaret Le Bœuf sur le toit. Comme l’a dit sa biographe Pauline Dreyfus : « C’est au chevet d’un Marcel Proust mourant que s'affirme la vocation littéraire de Paul Morand ; et c'est dans le vacarme d'une modernité incarnée par Jean Cocteau qu'elle va s'épanouir… »[10]. Comme souvent, après avoir été ostracisé pour son antisémitisme et son engagement aux côtés de Pierre Laval, il est aujourd’hui à nouveau remis à l’honneur pour son œuvre littéraire : « l’homme a fait beaucoup de tort à l’écrivain » dit sa biographe.

 

 

 

Le Paul Morand de Pauline Dreyfus

 

Il a d’ailleurs eu lui aussi son aventure cinématographique, après avoir rencontré une actrice de 18 ans qui devint sa maîtresse, et plus tard la Belle de « La Belle et la Bête » de Cocteau. Participant ainsi du mélange des genres et des arts caractéristique de l’époque, et de l’entourage de Cocteau, Morand a ainsi collaboré avec Alexandre Arnoux pour écrire le scénario d’un film adapté du « Don Quichotte » de Cervantes ; réalisé par Georg Wilhelm Pabst, le film est sorti en 1933. Ce n’est pas un opéra, mais c’est le grand Chaliapine qui interprète le rôle-titre, et il chante quatre arias, composés pour le film. C’est un film superbe qui reste un grand classique et une référence, seul le scénario a été critiqué…

 

C’est ce personnage sulfureux dont les nouvelles et le style ont fasciné les émules chinois des néosensationnistes japonais. Comme le dit encore Pauline Dreyfus : « D’emblée, dans ses nouvelles et ses romans, Morand épouse les prouesses de son siècle en rompant avec un monde englouti à jamais... Il roule vite, il vole loin. La Terre a rétréci et il le fait savoir…. » Mais ce n’est pas seulement son style que ces écrivains ont voulu imiter, c’est sa vie même, entre divertissements mondains et avant-garde littéraire et artistique. Et Liu Na’ou était sans doute le plus caractéristique, avec son goût pour l’argent et les femmes… et pour l’opium, ce qu’on dit rarement, il aura fallu Emily Hahn pour le dire.

 

Littérature, cinéma… et tradition

 

Ce mouvement littéraire était aussi concomitant des premiers balbutiements du cinéma chinois, l’un nourrissant l’autre. On retrouve dans les films bien des traits caractéristiques du néosensationnisme tant dans le style que dans les images, dont l’aspect syncopé est accentué par les contraintes dues à la technique du muet. Comme dans les cercles parisiens autour de Cocteau, comme dans le cas de Kawabata, il y a collusion entre écrivains et cinéastes.

 

Liu Na’ou, par exemple, a dirigé la revue « Cinéma moderne » (Xiandai dianying《现代电影》) et il a produit  en 1938, à la compagnie Guangming (光明影业公司), un film réalisé par Li Pingqian (李萍倩), inspiré de « La Dame aux camélias » (Chahua nü《茶花女》). Ce n’est certainement pas anodin : derrière « La Dame aux camélias » se profilait Alexandre Dumas fils, alter ego du fils de Zeng Pu, mais surtout c’était la première grande traduction de Lin Shu (林紓) et de son comparse Wang Shouchang (王寿昌), publiée la 25e année du règne de Guangxu, c’est-à-dire en 1899. Ce fut ainsi le premier roman occidental introduit en Chine à devenir populaire dans tout le pays, sous le titre « Histoire transmise à la postérité de la Dame aux camélias de Paris » (《巴黎茶花女遺事》). On a appelé le roman « Le Rêve dans le pavillon rouge occidental ». Il faut rappeler que c’était un an après l’échec de la Réforme des Cent jours, alors que tout espoir de réforme politique était envolé… le roman et le cinéma prenaient le relais des espérances mortes.

 

 

 

La traduction de Lin Shu

 

Le roman n’a cessé de connaître de nouvelles traductions[11] et de nouvelles adaptations. Il est à noter que la représentation théâtrale à Tokyo, en 1907, par des étudiants chinois de la compagnie Chunliu (“春柳社”), fut aussi l’une des premières représentations de théâtre huaju sous l’influence du nouveau théâtre japonais, avec Li Shutong (李叔同) dans le rôle principal. On était encore dans la tradition de l’opéra chinois, avec les rôles féminins interprétés par des acteurs, comme au Japon. Là aussi, les représentations au Japon de la troupe Chunliu étaient fortement influencées par les événements politiques en Chine.

  

 

 

Li Shutong (à g.) dans le rôle de

la Dame aux camélias en 1907 à Tokyo

 

On mesure ainsi tout ce que le néosensationnisme comportait malgré lui, pour ainsi dire, de tradition indissociable de la culture ambiante. Mais aussi de volonté affichée et turbulente de s’en démarquer. Il était le produit d’une époque et ne lui a pas survécu.

 


 

[1] Personnage aussi fantaisiste que l’origine aristocratique qu’il s’était inventée, il s’était initié au chinois dans l’entourage de la femme de lettres Judith Gautier, fille de Théophile Gautier et première femme à intégrer l’Académie Goncourt, en 1910, après la mort de Jules Renard qui la détestait. Elle s’était prise de passion pour la langue et la culture chinoises après avoir recueilli un réfugié politique chinois en France. Après avoir divorcé de Catulle Mendès avec pertes et fracas, elle s’installa 30 rue de Washington dans un appartement rempli de bouddhas et d’objets chinois, s’habillant de robes de soie qu’elle faisait venir à grands frais de Chine. Beaucoup de ses écrits sont sur Gallica, dont le fameux Livre de Jade, recueil de « poèmes chinois anciens » publié en 1867 qui donne une curieuse idée de la poésie chinoise, reflet de l’exotisme que l’on trouvait dans la Chine à l’époque.

Quant à Soulié, il voulut devenir archéologue mais se heurta à Victor Segalen. Finalement il devint acupuncteur, et auteur d’un traité sur l’acupuncture. Mais il est lui aussi l’auteur de florilèges de poésie chinoise, et même d’un essai sur la littérature chinoise, publiés en 1923 et 1924.

Boris Vian l’évoque sous le nom de Bottine de Mourant dans son Automne à Pékin (1947) : « « Il avait mal au couturier droit, et tenta de se planter une épingle dans la joue pour faire passer la douleur ; l’étude de l’acupuncture dans les ouvrages du Dr Bottine de Mourant était un de ses passe-temps ; par malheur, il ne visa pas bien et se guérit d’une néphrite du mollet qu’il n’avait pas encore attrapée… ».

[2] Cité dans From May Fourth to June Fourth, Fiction and Film in 20th Century China, Ellen Widmer/David Der-Wei Wang ed., Harvard University Press, 1993, chapter 5 “Urban Exoticism in Modern and Contemporary Chinese Literature”, p. 137.

[4] Disponible sur Gallica : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8600276c/f9.item

Et Thaïs montant sur scène s’attire la réprobation des lettrés alexandrins qui s’offusquent du déclin du théâtre et du fait qu’une femme ose se montrer sur scène (« Qu’eussent dit les Athéniens de Périclès ? Il est indécent qu’une femme paraisse en public. ») – exactement comme les Chinois qui nourrissaient le même mépris pour les actrices de cinéma, ou de théâtre en général.

[5] Emily Hahn, China to Me, Virago Press, 1987.

[6] Traduit en français : Chronique d’Asakusa, trad. Suzanne Rosset, Albin Michel, 1988 ; réédition Le Livre de Poche, 1992.

[7] Le scénario raconte vaguement l'histoire du concierge de l'asile, dont la femme est l'un des patients. Un jour, leur fille se présente à l'asile pour annoncer ses fiançailles à sa mère, ce qui déclenche un certain nombre d'intrigues secondaires. Des flashbacks font découvrir l'histoire de la famille. On apprend en particulier qu'avant d'être internée, la mère a voulu se noyer avec son bébé et que seul ce dernier est mort. Son mari, devenu concierge, tente vainement de la faire sortir de l'asile…

Le film (70’) a été projeté à la Cinémathèque à Paris en 1972, au festival des Trois-Continents en 2012, et de nouveau à Paris en septembre 2017 dans le cadre de l’Etrange Festival au Forum des images. Il en existe maintenant un DVD sous-titré en français.

[8] Morand a en France une image réactionnaire : il a été l’une des figures de proue du mouvement des Hussards contre l’existentialisme, et de la Table ronde contre Les Temps modernes. Son conservatisme l’a poussé en politique à se ranger aux côtés des monarchistes de l’Action française, et son antisémitisme à collaborer avec le régime de Vichy. Au début de la 1ère Guerre mondiale, il réussit à se faire verser dans le corps de réserve. Sa vie était celle d’un dandy fréquentant les milieux de l’aristocratie et de l’avant-garde artistique.

[9] Prix que le premier lauréat, Romain Gary, juif et gaulliste, déclina, et qui revint donc à … Le Clézio qui l’accepta, lui, sans ciller.

[10] Pauline Dreyfus : Paul Morand, Gallimard, 2020.

Biographie qui aura fait ressortir tout le dégoût qu’inspire l’homme, comme dans cette superbe critique de Pierre Assouline : https://larepubliquedeslivres.com/paul-morand-un-homme-meprisable-mais-quel-ecrivain/

[11] En particulier, la traduction de Lin Shu étant en chinois classique, une autre traduction, en chinois vernaculaire, d’un biologiste du Hubei qui avait étudié en France, fut publiée en 1929.


 

     

 

 

 

 

     

 

 

 

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