Histoire littéraire :
les sources anciennes
V. Le Livre des rites
par
Brigitte Duzan, 22 juin 2020
Le
« Livres des rites » (Lǐjì《礼记》)
est l’un des cinq classiques du canon confucéen établi sous les
Han. Associé à deux autres ouvrages de rituels de la même
époque, les « Rites des Zhou » (Zhōulǐ
《周礼》)
et les « Rites cérémoniels » (Yílǐ《仪礼》),
il forme le « Classique des rites » (Lǐjīng《礼经》).
Attribué aux sages de la dynastie des Zhou (周朝,
1046–256 av. J.-C.), mais ayant disparu à la suite de l'autodafé
initié vers 213 avant J.-C. sous le règne du premier empereur,
fondateur de la dynastie des Qin, Qin Shihuang (秦始皇),
il fut reconstitué sous les Han de l’Ouest.
Il
décrit les formes sociales, le système administratif et les
rites cérémoniels de la dynastie Zhou. Il aborde les décrets et
les institutions, les règles et les règlements, ainsi que les
rituels et les usages. Lǐ est généralement traduit par
« rites », mais peut également signifier « cérémonie » et
désigne globalement les normes ou règles de conduite. Au cours
du temps, les idées liées au lǐ furent peu à peu
intégrées dans les concepts relevant de l'éthique et de l'ordre
social, au fur et à mesure que le peuple les intégrait à la vie
quotidienne.
Le
« Classique des rites » (Lǐjīng《礼经》)
tel que nous le connaissons est constitué de trois ouvrages qui
furent reconstitués à partir de fragments retrouvés, de
souvenirs préservés oralement, mais aussi de rédactions
apocryphes.
1. Les « Rites des Zhou » ou
Zhōulǐ (《周礼》),
connu jusqu’à la dynastie des Tang sous le nom de
« Fonctionnaires des Zhou » ou
Zhōuguān
(周官)
car c’est une description idéalisée de
l’administration des Zhou, précise dans les moindres
détails les fonctions officielles participant au
gouvernement, à partir du souverain, et réparties en
six catégories, ébauches des six ministères de
l’administration impériale. |
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Le Zhouli |
Le texte aurait été remis à l’empereur Han Wudi (汉武帝)
par un collectionneur de la famille impériale, sauf le
chapitre six qui n’a jamais été retrouvé ; conservé dans la
bibliothèque impériale, il a ensuite été repris vers l’an 9
avant Jésus-Christ par l’historien Liu Xin (刘歆)
poursuivant le travail de bibliographie de son père Liu
Xiang (刘向).
On considère généralement qu’il date de la fin des Royaumes
combattants.
2. Les « Rites cérémoniels » ou Yílǐ
(《仪礼》) sont
la description détaillée de l’étiquette et des
rituels observés par la petite aristocratie des Zhou
lors des évènements publics et privés (mariages,
anniversaires et autres). C’est le premier des
trois volumes du « Classique des rites » à avoir été
reconstitué, vers 180 avant Jésus-Christ), dix-sept
chapitres venant des souvenirs du lettré Gao Tang (高堂).
Des fragments confirmant sa version furent retrouvés
à la fin du 2e siècle avant
J.-C. dans
la demeure ancestrale de Confucius. Considéré comme
un authentique document d’avant les Qin,
il était connu sous les Han comme l’« Ancien
classique des rites » ou |
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Le Yili |
Lǐgǔjīng
(《礼古经》),
en 56 chapitres. Seule
la version commentée par Liu Xiang nous est parvenue. Plus
succinct que le Liji et moins étudié, il fut remis à
l’honneur sous les Song du Sud par Zhu Xi (朱熹).
3. Le « Livre des Rites » proprement dit ou
Lǐjì
(《礼记》)
est donc considéré comme le développement du
précédent. Il offre un contenu beaucoup plus varié
(anecdotes, discours et dialogues outre les
descriptions). Certains passages se retrouvent en
particulier dans le Huainanzi
(淮南子).
À l’origine composé de 131 chapitres selon son
premier compilateur, Liu Xiang, il proviendrait,
comme les parties authentiques du Zhouli, de
la collection de textes anciens rassemblée sous
l’empereur Han Wudi.
Parmi les grands commentateurs de rituels des Han de
l’Ouest, Dai De (戴德)
et son neveu Dai Sheng (戴圣)
en ont produit chacun une version condensée et
commentée : le « Livre des rites du grand Dai » ou
Dàdài lǐjì
(《大戴礼记》)
en 85 chapitres et le « Livre des rites du petit
Dai » |
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Le Liji |
ou Xiǎodài
liji
(《小戴礼记》)
en 46 chapitres. La seconde version ayant été plus
appréciée, la version longue a disparu après les Tang, mais
on en a retrouvé 27 chapitres. Au Xiaodai ont été
ajoutés par ailleurs trois documents indépendants : le Yueling (月令)
sur le calendrier, le Tangwei (堂位)
sur les fonctions officielles et le Yueji (乐记)
sur la musique.
Sous les Song,
Zhu Xi a extrait
deux chapitres du Liji, l’« Invariable Milieu » ou Zhōngyōng (《中庸》)
et « La Grande Etude » ou Daxue (《大学》),
pour les ajouter à sa sélection des quatre livres du canon
néo-confucéen
(四书),
avec les « Entretiens de Confucius » ou Lunyu (《论语》)
et le « Mencius » (《孟子》).
Le Liji a longtemps été le principal objet d’études des
trois ouvrages de rituels. C’est lui qui offre toutes sortes
d’anecdotes souvent à la source d’expressions de type chengyu
et de citations dans les textes littéraires.
Texte original,
y compris Zhongyong et Daxue :
http://www.shicimingju.com/book/liji.html
Texte original et traduction en anglais :
https://ctext.org/liji/jiao-te-sheng/ens
Edition historique numérisée en ligne
Edition annotée du 12e siècle, sous les Song du Sud.
https://www.wdl.org/fr/item/11379/
Traductions en français
-
Le Tcheou-li ou Rites des Tcheou, traduit pour la première fois
du chinois par feu Édouard Biot (2
volumes), édité par Jean-Baptiste Biot, Imprimerie nationale,
Paris, 1851. Rééd. : Cheng Wen Publishing Co., Taipei, 1975.
Texte numérisé en ligne dans la collection Chine ancienne de
Pierre Palpant :
Tome I :
http://classiques.uqac.ca/classiques/chine_ancienne/B_livres_canoniques_Petits_Kings/B_21_tcheou_li/tcheou_li.html
Tome II :
http://classiques.uqac.ca/classiques/chine_ancienne/B_livres_canoniques_Petits_Kings/tcheou_li_2/tcheou_li_2.html
-
Li Ki, ou Mémoires sur les Bienséances et les Cérémonies,
double trad. en français et en latin par Séraphin Couvreur (2
volumes), Ho Kien Fou, Imprimerie de la mission catholique,
1913.
Version numérisée en ligne :
Tome I :
https://archive.org/details/likioummoiress01couvuoft
Tome II :
https://archive.org/details/likioummoiress02couvuoft
-
I Li, Cérémonial, trad. Séraphin Couvreur, 1ère
éd. 1916, rééd.
Les Humanités d’Extrême-Orient, Cathasia, Société d'éditions Les
Belles Lettres, Paris, 1951, 667 p.
https://www.chineancienne.fr/king/i-li-c%C3%A9r%C3%A9monial-trad-s-couvreur/
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