Mu Xin
木心
1927-2011
Présentation
par Brigitte
Duzan, 11 mai 2023
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Mu
Xin en 1988 (photo Mu Xin Art Foundation) |
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Mu Xin (木心)
est le nom de plume de Sun Pu (孙璞),
peintre, poète et écrivain né en février 1927 dans la vieille
ville de Wuzhen (乌镇),
dans le Zhejiang.
Esquisse
biographique
Né dans une
famille de riches industriels de Shanghai, Mu Xin a reçu une
éducation de lettré traditionnel.
En 1946, il
entre à l’Institut des Beaux-arts de Shanghai (上海美术专科学校),
mais en est exclu pour avoir participé à des mouvements
étudiants au sein de l’École. Recherché par le Guomingdang, il
s’éclipse à Taiwan. En 1948, il sort diplômé de l’Institut des
Beaux-arts de Hangzhou où il était l’élève du peintre Lin
Fengmian (林凤眠),
l’un des premiers peintres chinois à avoir fait des études en
Europe et pionnier de l’art moderne chinois.
À la fin des
années 1940, Mu Xin enseigne ensuite à la Hangzhou High School
(ou Hanggao
杭高) –
école dotée d’une riche tradition littéraire où a été fondé en
octobre 1921, sous l’égide de Lu Xun, le premier club de
littérature du Zhejiang. Puis, dans les années 1950 et 1960, Mu
Xin travaille à l’Institut des arts et métiers de Shanghai.
Pendant la
Révolution culturelle, il est persécuté et, en 1971, accusé de
collusion avec l’étranger, arrêté et emprisonné pendant dix-huit
mois. Pendant cette période, il a eu trois doigts cassés et la
plupart de ses œuvres ont été détruites. Il a été en résidence
surveillée de 1977 à 1979, et ce n’est qu’en 1979 qu’il a été
réhabilité.
En 1982, il
part vivre à New York où il est ensuite resté jusqu’en 2007. De
1982 à 1994, il enseigne la littérature à un groupe d’artistes.
Ses cours ont plus tard été collectés et publiés par son élève,
l’artiste et critique d’art Chen Danqing (陈丹青)
parti lui aussi à New York en 1982.
En 1994, tous
deux ont fait un voyage en Angleterre dont Chen Danqing a évoqué
le souvenir nostalgique dans un article que l’on peut lire
sur le site de
la British Library,
complétant, dit-il, le manuscrit inachevé de son mentor, « Mille
et une nuits à Shanghai ». Un mentor qui, comme Lu Xun, n’était
pas passionné de voyages, préférant la compagnie de ses papiers
et pinceaux et trouvant que le credo « Voir, c’est croire »
était une philosophie de touriste
.
Pendant son
séjour new-yorkais, plusieurs de ses amis lui ont proposé des
voyages en France, en Espagne, en Autriche, en Russie, pour se
heurter in fine à une fin de non-recevoir. C’était une réaction
d’artiste déçu dans ses aspirations, qui n’avait plus goût à
tenter des expériences : tout avait un goût amer. Même
l’Angleterre – où il a pourtant été reçu avec le plus extrême
raffinement dans le manoir Tudor d’un riche collectionneur – lui
a paru un pays dévasté par la guerre où il ne retrouvait pas ses
souvenirs littéraires, de Shakespeare à Byron et Wilde. Il n’a
même pas assisté à l’inauguration de l’ exposition de ses œuvres
à la galerie d’art de l’université de Yale en 2001, exposition
qui a ensuite tourné à Chicago, Honolulu et New York.
Vous vous
étiez exilé ? lui a-t-on demandé. C’était juste une longue
flânerie, a-t-il répondu.
Mu Xin est
rentré chez lui à Wuzhen en 2007 et y est décédé en décembre
2011. En 2015, un musée Mu Xin (木心美术馆)
y a été inauguré, sous la direction de Chen Danqing. Mais son
constant refus de voyager fait qu’il est toujours aussi peu
traduit, et que son nom est toujours aussi peu connu.
Peinture
et littérature
Paysages
Les peintures
de Mu Xin sont principalement des peintures de paysage, mais
dans un style hybride, à la fois à l’encre et à la peinture,
mêlant à l’art traditionnel chinois du shanshui des
éléments d’art occidental relevant de l’impressionnisme pour
l’usage de la lumière et de l’expressionnisme abstrait pour le
rendu des lignes du paysage et des compositions.
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Sunset in the Yellow Mountains, 1977-79,
encre
et gouache sur papier |
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Environ 500 de
ses tableaux ont été détruits pendant la Révolution culturelle ;
une trentaine seulement ont survécu. Il est le premier des
artistes chinois du 20e siècle dont des œuvres ont
été acquises par le British Museum.
Littérature
Mu Xin a
également pratiqué le même genre d’hybridation artistique dans
le domaine littéraire, produisant fiction, essais et réflexions
philosophiques dans un style mêlant tradition littéraire
chinoise et modernisme occidental.
Son œuvre
littéraire comme sa peinture a souffert des déprédations de la
Révolution culturelle : une vingtaine de manuscrits inédits des
années 1950 et 1960 ont été détruits au début de la période.
Puis, de 1971 à 1973, il a écrit des « Notes de prison » dont 66
pages ont été publiées en traduction anglaise en 2002. Par la
suite, à New York, il a publié des recueils de poèmes et
d’essais ainsi que des nouvelles. Une première traduction, en
anglais, d’un recueil de treize de ses nouvelles, écrites entre
1986 et 1988, a été publiée à New York en 2011 : « The Empty
Room » (《空房》).
Puis une première traduction, également en anglais, d’un recueil
de poèmes a été publiée en 2017 à Londres : « Toward Bravery » (《如偈》).
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An
Empty Room |
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Toward Bravery and Other Poems, éd.
bilingue |
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Publications et traductions en anglais
-
The Art of Mu Xin: Landscape Paintings and Prison Notes,
Smart Museum of Art, University of Chicago, 2002
-
Memoirs of World Literature (notes from Mu Xin’s lectures
1989-1994), 2012
Publication en Chine :
《文学回忆录》“木心讲述”,广西师范大学出版社
2013.
-
An Empty Room: Stories,
tr. Toming Jun Liu, New Directions, 2011, 160 p.
-
Toward Bravery and Other Poems, tr. Mingyuan Hu, Hermits United
2017, éd. bilingue 2022, 90 p.
À
lire en complément
A Thousand and One Nights in England, tr. Dr. Hu Minyuan :
https://www.britishlibrary.cn/en/articles/a-thousand-and-one-nights-in-england-2/
The Landscape of Memory: The Art of Mu Xin
http://sites.asiasociety.org/arts/muxin/
Et écouter
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