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				Mai Jia 
				麦家 
				Présentation 
				par Brigitte Duzan, 31 août 2012, 
				actualisé 10 décembre 2016   
					
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						Auteur de 
						romans d’espionnage dont l’intrigue se situe dans les 
						années 1930 à 1950, Mai Jia (麦家) 
						est devenu célèbre lorsque deux d’entre eux ont été 
						portés à l’écran, d’abord à la télévision, puis au 
						cinéma. Il a ainsi non seulement lancé en Chine la vogue 
						de ce genre littéraire, mais a en outre contribué à 
						l’essor des films d’espionnage alors que le  cinéma 
						chinois les ignorait jusque là.  
						  
						Formé 
						malgré lui à l’espionnage 
						  
						Mai Jia (麦家) 
						est le nom de plume de 
						Jiang Benhu (蒋本浒), 
						né en 1964 à Fuyang, dans le Zhejiang (浙江富阳).
						 
						  
						Etudes à 
						l’armée 
						  
						Ses origines 
						familiales ont été un sévère handicap pour lui pendant 
						la Révolution culturelle : son père avait été 
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						Mai Jia |  
				condamné comme 
				« droitier », son grand-père maternel était un propriétaire 
				terrien et son grand-père paternel converti au christianisme. 
				Pour tenter d’améliorer quelque peu son statut politique et son 
				dossier personnel, il s’est enrôlé dans l’armée dès qu’il a pu, 
				au lendemain de la Révolution culturelle. Il y est resté 
				dix-sept ans. 
				  
				C’est dans l’armée 
				qu’il a fait ses études : il a d’abord décroché un diplôme 
				d’ingénieur en électronique, en 1983, puis a été admis à 
				l’Institut des Beaux-Arts de l’Armée de Libération (人民解放军艺术学院) 
				dont il est sorti en 1991. Il a commencé à écrire pendant ses 
				études, en 1986, mais ses dons furent utilisés au départ pour 
				rédiger de la propagande.  
				  
				Au sortir de l’armée, 
				en 1997, il est devenu scénariste pour la télévision de Chengdu, 
				ville où il réside toujours. Ce n’est qu’avec le succès de 
				l’adaptation télévisée de son second roman, diffusée en 2006, 
				que son œuvre a commencé à être connue, et qu’il a pu devenir 
				écrivain professionnel, membre de 
				l’association des 
				écrivains de Hangzhou en 2008. 
				  
				Espion littéraire
				 
				  
				Ce qu’il ne savait pas, 
				c’est que l’institut de formation d’ingénieurs de l’armée où il 
				était entré recrutait en fait pour former des spécialistes du 
				renseignement. Il n’est pas devenu espion, mais il a travaillé 
				plusieurs années dans une unité où il a connu un certain nombre 
				d’agents secrets : ils ont constitué les modèles des personnages 
				de ses romans. 
				  
				D’ailleurs, ses deux 
				premiers romans sont racontés par un narrateur qui s’appelle 
				« Mai Jia », dont le parcours est très semblable à celui de 
				l’auteur. Cette astuce formelle donne une teinte d’autant plus 
				réaliste aux livres ; elle a contribué à nimber l’auteur de 
				mystère pendant un certain temps. 
				  
				Une œuvre miroir 
				de son auteur 
				  
				Connu surtout pour sa 
				trilogie de romans d’espionnage, Mai Jia a également écrit des 
				nouvelles, des essais, et même de la poésie. Mais, si ses romans 
				sont si connus, c’est parce qu’ils ont été adaptés, à la 
				télévision d’abord, puis au cinéma. C’est cette célébrité 
				indirecte qui a incité à publier le reste de son œuvre et permis 
				sa découverte.  
				  
				La trilogie 
				 
				  
				Ses trois célèbres 
				romans d’espionnage sont d’un réalisme fondé sur son expérience 
				personnelle, authentique, mais aussi sur des documents longtemps 
				secrets, et déclassifiés depuis peu.  
				  
					
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						1. « Décryptage »
						(《解密》jiěmì), 
						publié en 2002, est 
						l’histoire 
						tragique d’un surdoué des maths, orphelin d’une famille 
						de génies mathématiques, devenu un grand décrypteur de 
						codes secrets ; mais, fragile, il est poussé ensuite à 
						la folie par la sombre réalité du monde de la 
						cryptologie.  
						  
						Adoptant le 
						rythme et le suspense d’un bon roman policier, le livre 
						combine des éléments de réalisme magique, de fiction 
						historique et d’espionnage d’Etat. Les éléments de roman 
						policier traditionnel – code à déchiffrer, espionnage et 
						installations militaires secrètes – sont traités de 
						manière secondaire, pour donner la place la plus 
						importante à l’étude de caractère, sur fond de 
						chamboulement national atteignant des proportions 
						épiques. 
						  
						L’histoire est 
						contée non comme un roman d’espionnage traditionnel, 
						mais comme une biographie reconstituée par 
						 |  | 
						
						 
						Décryptage |  
						un 
						enquêteur à partir des 
				interviews de la famille et des anciens collègues, et en 
				commençant par une histoire de la famille remontant à deux 
				générations. 
				  
				Mai Jia multiplie les 
				clins d’œil et les détails visant à renforcer le sentiment 
				d’authenticité qui se dégage de son roman, comme la confession 
				qu’il a violé son engagement de transparence en changeant les 
				noms de deux des personnages principaux, dans le but de les 
				protéger. Sachant qu’il avait lui-même des relations dans les 
				milieux du renseignement militaire, cela renforce l’impression 
				de vérité, sans que l’on sache vraiment où s’arrête le vrai et 
				où commence la fiction. 
				  
				« Décryptage » a eu un 
				succès aussi inattendu qu’immédiat. 
				  
					
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						2. 
						« Opérations 
						secrètes »《暗算》
						
						ànsuàn), 
						publié in 2003, a été un réussite bien plus étonnante : 
						adapté, par Mai Jia lui-même, en une série télévisée en 
						34 épisodes diffusée en 2006, le succès remporté (1) a 
						entraîné la réédition du roman, qui a ensuite obtenu le 
						7ème prix Mao Dun en 2008. Il a déclenché en 
						Chine une vogue de romans d’espionnage. On a comparé Ma 
						Jian à Dan Brown et « Opérations secrètes » au « Da 
						Vinci Code ». 
						  
						Le roman se 
						divise en trois parties qui se passent à trois époques 
						différentes : « A l’écoute du vent » (《听风》), 
						dans les années 1930, « En regardant le vent » (《看风》), 
						dans les années 1950, et «  A la poursuite du vent » (《捕风》), 
						dans les années 1960 (2). Chaque partie représente un 
						type 
						d’opération 
						particulier : la surveillance des messages radio, le 
						décryptage des codes secrets et les missions spéciales 
						sur le terrain. |  | 
						 
						Opérations secrètes |  
				  
					
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						Opérations secrètes, la série télévisée |  | 
						A partir de 
						l’histoire d’un père et de son fils, spécialistes de 
						décryptage, et d’autres agents de leur unité, dont un 
						aveugle et un génie des maths (repris du roman 
						précédent), Mai Jia dépeint trente ans de l’histoire 
						chinoise, vue sous 
						l’angle très 
						particulier du renseignement militaire.    
						Mais son roman 
						est surtout d’une grande richesse dans la description 
						des personnages, révolutionnaires, psychotiques ou 
						surdoués, de leurs caractères et de leur sort tragique 
						dans des situations impossibles, plus ou moins imposées 
						par les circonstances, où chacun est engagé dans une 
						lutte quotidienne pour tenter de survivre. Il captive 
						par une intrigue complexe, pleine de suspense et de 
						rebondissements – et c’est en cela que Mai Jia peut être 
						rapproché de Dan Brown. |    
				Le roman a été adapté 
				au cinéma en 2012. Intitulé « The Silent War » (《听风者》),
				le film 
				ne reprend cependant qu’une partie du livre, et dénature la 
				peinture des personnages en doublant d’une histoire 
				d’amour 
				l’histoire d’espionnage, elle-même limitée à la période allant 
				des années 1940 au début des années 1950 (3).  
				  
					
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						3. « Rumeurs » 
						(《风声》
						
						Fengsheng), 
						publié en 2007, se passe pendant l’occupation japonaise, 
						dans les années 1940. 
						  
						Le spécialiste 
						du décryptage Gu Xiaomeng (顾晓梦), 
						alias « vieux fantôme » (老鬼), 
						s’est infiltré sous une fausse identité au sein des 
						réseaux japonais 
						et a réussi à 
						faire passer des informations importantes aux agents 
						communistes. Mais un de ses messages est intercepté et 
						il est surveillé. Il est d’autant plus en danger que, 
						comme il a contribué à semer la pagaille dans les rangs 
						de l’intelligence japonaise, celle-ci est activement à 
						sa recherche, en tentant de percer l’identité véritable 
						de ce  
						« vieux fantôme »…. (4) 
						  
						Le livre 
						parachève la vision à la fois sombre et réaliste des 
						milieux du renseignement militaire qu’offre Mai Jia dans 
						cette trilogie : un monde fascinant où règnent 
						l’ambiguïté et le doute autant que le danger. Tous les 
						personnages sont  |  | 
						
						 
						Rumeurs |  
						engagés dans 
				des jeux de chats et de souris d’où personne 
				ne sort gagnant, où 
				chacun lutte pour découvrir des messages secrets avant d’être 
				identifiés et mis hors jeu par l’adversaire. Chacun est attiré 
				par l’information interdite, dans une fascination morbide aux 
				conséquences fatales, sans aucun espoir de jamais atteindre une 
				quelconque lumière salvatrice. 
				  
				Mai Jia décrit avec 
				maestria cette prodigieuse confusion de vérités qui n’en sont 
				pas, ce dédale de certitudes constamment faussées, une 
				information périlleusement glanée venant contredire la 
				précédente et détruire ce qui passait pour acquis. La vie prend 
				dans ses romans l’aspect d’un cauchemar éveillé où l’important 
				est de garder une longueur d’avance sur l’ennemi, réel et 
				supposé. 
				  
				Car le pire, dans cet 
				univers à la Murnau, c’est que rien ni personne n’est plus sûr, 
				que même la famille et les amis deviennent des dangers, le 
				moindre faux pas pouvant entraîner des conséquences dramatiques. 
				Dans ces conditions, chacun s’enferme dans un isolement 
				préventif, en s’accrochant à ses bribes d’information secrète… 
				  
				Chez Mai Jia, le drame 
				humain rejoint le suspense policier et la fiction historique, et 
				c’est ce qui fait la valeur de ses romans, outre la qualité 
				d’une écriture à mi chemin du réalisme et du fantastique. 
				 
				  
						Les autres 
						écrits   
					
						| 
						On a tendance 
						à limiter l’œuvre de Mai Jia à ces trois romans, 
						auxquels est venu se rajouter un quatrième, « La pointe 
						de la lame » (《刀尖 
						
						dāojiān》), 
						un très long roman que Mai Jia a mis huit ans à écrire 
						(5), en deux volumes qu’il définit comme étant "deux 
						parties yin et yang" (“阴阳”两部). 
						  
						  
						Il raconte les 
						expériences médicales faites par une unité secrète de 
						l’armée japonaise pour mettre sur pied une drogue létale 
						visant à atrophier le cerveau et détruire le système 
						nerveux, et l’organisation mise sur pied pour tenter d’y 
						mettre fin. Il comporte cependant aussi une histoire 
						d’amour qui vient compliquer les choses…. 
						  
						Mais Mai Jia a 
						également écrit des nouvelles et des essais, publiés en 
						recueils après le succès rencontré par ses romans. |  | 
						
						 
						La pointe de la lame (1 et 2) |    
					
						| 
						1. Deux 
						recueils d’essais ‘au fil de la plume’ (随笔集) ont été publiés : « Ce que dit le chasseur de vent » (《捕风者说》)
						
						et « A mi-chemin dans l’existence » (《人生中途》). 
						  
						Ils ne sont pas 
						devenus des best-sellers comme les romans, mais ils 
						apportent des indications sur le caractère, les idées et 
						les goûts de leur auteur, sur son œuvre aussi. Il 
						l’explique ainsi dans la préface du premier recueil : 
						  
						相对于我的小说,这是我的“影子”写的一本书,散漫,飘忽,虚悬,踪影不定,浓淡无度,时断时续……“影子”是一个虚空的我,也可能是一个更真实的我。我总是设法在小说中把真实的我藏隐起来,在这里却常常把我的真实一一铺张开来:身世,经历,家庭,亲人,挚友,好恶,困惑,恐惧,念想…… 
						Relativement 
						à mes romans, ce livre est comme une « ombre », 
						désorganisé, mouvant, incertain, sans marques très 
						nettes ni continuité….. Cette  |  | 
						 
						Ce que dit le chasseur de vent |  
				« ombre » est une 
				image vide de moi, mais ce peut être aussi mon moi véritable. Je 
				me suis toujours efforcé de dissimuler mon être réel dans mes 
				romans; ici au contraire, ce moi authentique se déploie au long 
				des pages dans toute sa diversité : vécu, expériences, famille, 
				proches, amis intimes, goûts, perplexités, craintes, idées…                               
				(avril 2008) 
				  
					
						| 
						2. Quant aux 
						nouvelles, de toutes longueurs, mais plutôt longues 
						en général, Mai Jia en a déjà plusieurs recueils à son 
						actif, qui reprennent plus ou moins les mêmes thèmes que 
						ses romans, mais à quelques notables exceptions près : 
						- « Code 
						pourpre, code noir » (《紫密黑密》) 
						- « Code 
						secret »《密码》 : 
						ensemble de textes regroupés en deux parties qui 
						s’opposent en jouant sur le moi et le non moi (非我/我非我), 
						comme il joue des notions de yin et de yang pour définir 
						les deux volumes de son dernier roman ;  
						    
						- 
						« Clandestinité » (《地下的天空》), 
						adapté à la télévision ; 
						- « Une 
						histoire pleine d’amour et de malheur » (《充满爱情和凄楚的故事》) 
						… 
						  
						De cet ensemble 
						ressort une nouvelle relativement courte : 
						Deux 
						jeunes filles de Fuyang 
						
						《两位富阳姑娘》 
						  
						  |  | 
						
						 
						Code secret |  
 
				  
						A lire en 
						complément  
				  
				Sans la série 
				Afterlives de Read Paper Republic 
				Two Young Women 
				From Fuyang, translated by Yu Yan Chen  
				
				
				
				https://paper-republic.org/pubs/read/two-young-women-from-fuyang/ 
				Texte chinois : 
				
				http://cul.qq.com/a/20140410/008780.htm 
				  
				  
				  
				
				Notes 
				(1) Succès dû à 
				l’intrigue, mais aussi à 
				de très bons acteurs - 
				dont Wang Baoqiang (王宝强). 
				Sur cet acteur, voir
				:
				
				
				www.chinesemovies.com.fr/acteurs_Wang_Baoqiang.htm 
				(2) Dans les titres de 
				Mai Jia, le "vent" (风) 
				est pris au sens de bruits, rumeurs.  
				(3) Il est donc plutôt 
				centré sur la seconde partie du livre, mais en reprenant le 
				titre de la première partie. 
				Sur le film, voir : 
				
				
				
				www.chinesemovies.com.fr/films_Mak_Chong_Silent_War.htm 
				(4) Le roman a 
				également été adapté au cinéma.  
				Voir : 
				
				
				
				www.chinesemovies.com.fr/films_Gao_Qunshu_The_message.htm 
				(5) Selon la préface, 
				le manuscrit a été commencé en 2003, sur la base d’une valise de 
				documents qu’un médecin de l’armée à la retraite qu’il avait 
				connu vingt ans auparavant était venu lui remettre en mains 
				propres, à Chengdu, en lui suggérant d’écrire un roman dessus.
				     
				  
				  
				  
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