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Li Jingrui 李静睿

Présentation

par Brigitte Duzan, 16 décembre 2016, actualisé 6 octobre 2018   

 

Li Jingrui est encore relativement peu connue, même en Chine, car ses publications sont encore récentes : elle n’a commencé à publier qu’au début de 2013. Mais elle était déjà connue pour sa chronique dans le Wall Street Journal (édition en chinois). C’est certainement, parmi la génération des jeunes écrivains ‘post 80’, l’un des talents les plus prometteurs.

 

Du Sichuan à Pékin : journaliste et bloggeuse

 

Elle est née en 1982 à Zigong, dans le Sichuan (四川自贡).

 

Elle est diplômée de l’école de journalisme de l’université de Nankin et, à partir de 2004, ses études achevées, a ensuite été pendant huit ans journaliste spécialisée dans les affaires juridiques au Nouveau Quotidien de Pékin (新京报).

 

Li Jingrui

 

Elle a commencé à écrire pendant qu’elle était encore au lycée, vers dix-sept ans. Elle a alors subi la pression des éditeurs pour qu’elle écrive un roman. Mais, étant opposée à l’idée d’écrire sur commande et n’ayant pas l’intention de devenir « jeune écrivain à succès », elle a résisté. Ensuite elle est entrée à l’université, a lu, a aimé, s’est mariée, et passé dix ans sans rien écrire de suivi. Mais cela n’a pas été du temps perdu, l’expérience ainsi accumulée,en particulier à travers ses lectures, transparaît dans ce qu’elle écrit et reflète son refus de la facilité.

 

En mars 2007, elle va s’installer à Pékin, et, en 2009, commence une nouvelle expérience en écrivant dans le journal en ligne Dajia (大家) de Tencent (腾讯). Beaucoup de ses articles sont des notes de lectures, ou des réflexions sur la lecture, comme son billet d’avril 2014 : « Notes de lecture : solitude et création » (读书:孤独及其所创造的) [1]. Elle y analyse les raisons pour lesquelles elle lit – occupation à laquelle elle consacre plusieurs heures chaque jour :

以前我读书逃离孤独,现在我读书进入孤独。“ 

Autrefois je lisais pour échapper à la solitude, maintenant je lis pour trouver la solitude.

 

Mais, plus généralement, son écriture est nourrie de ses lectures. D’ailleurs le nom de sa page weibo en est témoin : « L’Ile d’Ithaque d’A Hua » (阿花的伊萨卡岛), A Hua étant son pseudonyme. En le choisissant, elle se plaçait ainsi l’égide du poète grec Constantin Cavafy, auteur du poème « L’île d’Ithaque », écrit à Alexandrie en 1911 :

Quand tu partiras pour Ithaque,
souhaite que le chemin soit long,
riche en péripéties et en expériences.
[2]

 

C’est le second vers de ce poème qui est aussi le titre de l’un des recueils de ses articles. Dans son poème, Cavafy invite le voyageur à flâner, à « s’enrichir de ses expériences avant de rentrer à l’île. Car Ithaque, dit-il, n’a rien à offrir, si ce n’est ce qu’elle a offert de meilleur : l’occasion du voyage. » C’est donc tout un programme pour Li Jingrui.

 

C’est une période riche d’expériences croisées entre ses lectures et ses écrits.

 

De Pékin à New York et retour : écrivain

 

Le Livre de chevet

 

2012 est un tournant et dans sa vie et dans son œuvre. Elle démissionne du journal pékinois et part un an à New York. Et là, nouvelle expérience, elle obtient une rubrique dans la version en chinois du Wall Street Journal qui devient vite populaire [3].

 

Elle commence à publier en avril 2013, un premier recueil d’essais publiés sur son blog

intitulé « Souhaite que le chemin soit long » (《愿你的道路漫长》), qui est suivie d’un second recueil du même genre, quatre mois plus tard : « Le Livre de chevet » (《枕边书》) ou Livre de l’oreiller – qui rappelle le chef-d’œuvre de la littérature japonaise que sont les « Notes de chevet » (《枕草子》) de Sei Shōnagon.

 

En octobre de la même année, elle publie son premier recueil de nouvelles, douze au total : « Histoires d’une petite ville » (小城故事), soit :

Un hiver silencieux 沉默的冬天 / Les morts 死者 /Sur des talons hauts 高跟鞋上 /La route sous la lune 月光下的路 /Des feux d’artifice mouillés 潮湿的烟花 /Le chant plein de tristesse de la boutique de nouilles 伤心凉皮铺之歌 /Deuxième frère 二哥 /La maison de thé 茶馆 /La vendeuse de laine à tricoter 卖毛线的女人 /Le chant sur la rive 岸上的歌声 /La ville du sel 盐·城 /Une petite ville 小城

 

C’est l’évocation de son coin du Sichuan. Le style est très réaliste, plein de détails vivants, visuels et stimulants pour l’imagination.

 

Depuis lors, elle a publié trois romans, dont le premier est dans le même style que son recueil de nouvelles : « Deux femmes d’un petit bourg » (《小镇姑娘》) – l’histoire de deux

 

Histoires d’une petite ville

 

Deux femmes d’un petit bourg

 

femmes aux destins croisés. Le plus récent, publié en juin 2016, est « Un destin minuscule » (《微小的命运》) : le destin d’une Sichuanaise de trente ans qui décide de rompre avec son petit ami et de partir pour Pékin et mène dès lors une vie schizophrénique entre New York et Zigong ; Li Jingrui montre que, si les deux villes sont très différentes, elles offrent cependant des destins similaires à son personnage qui rencontre les mêmes personnes, les mêmes hésitations et les mêmes doutes, et se retrouve avec les mêmes faiblesses à vaincre…

 

Ses récits ont parfois un aspect métaphorique : elle traite indirectement de sujets à caractère politique et social. C’est le cas en particulier d’un superbe article publié en mars 2013 sur weibo : « Je suis persuadée qu’un boulon va se desserrer et tomber » (《我相信会有一颗松掉的螺丝钉》) [4]. Boulon évidemment métaphorique : mais elle a dit depuis lors que l’évolution de la situation l’avait rendue beaucoup plus prudente dans sa vision de l’avenir.

 

Elle joue aussi de la métaphore politique dans ses nouvelles, comme « La route du nord » (《北方大道》), « L’ombre longue du cocotier » (《椰树长影》) ou « Disparu » (《失踪》). Cette dernière nouvelle, en particulier, histoire d’un homme qui a soudain disparu et qu’attend vainement sa femme … et qui finit par réapparaître sans explication, comme si de rien n’était. Histoire qui laisse évidemment songeur dans la Chine d’aujourd’hui.

 

Li Jingrui dit avoir encore beaucoup de récits inédits. Elle est l’un des rares jeunes écrivains chinois indépendants aujourd’hui.

 

 

Un destin minuscule

 


 

Principales publications

 

Recueil d’essais ‘au fil de la plume’ 随笔集

Avril 2013 Souhaite que le chemin soit long 《愿你的道路漫长》

Août 2013 Le Livre de chevet 《枕边书》

2015 Immergée dans son propre petit monde [5] 《总而言之不醒》

 

Recueil de nouvelles

 

Oct. 2013 Histoires d’une petite ville 小城故事 recueil de 12 nouvelles.

 

Nouvelle courte

 

Mai 2016 La jupe citron柠檬裙子

 

Nouvelle moyenne 

 

L’image inversée de New Nork 《纽约倒影》

Prix d’excellence, catégorie non fiction, du premier concours littéraire de douban.

第一届豆瓣阅读征文大赛非虚构组优秀奖

 

Romans

 

Mars 2015 Deux femmes d’un petit bourg 《小镇姑娘》

Début 2015 Cycle sans fin 《无终点循环》

Juin 2016 Un destin minuscule 《微小的命运》

 


 

Traductions en anglais

(à lire en ligne)

 

Nouvelles

 

Missing《失踪》, tr. Helen Wang – Read Paper Republic 6 août 2015

https://paper-republic.org/pubs/read/missing/

Texte chinois : https://plus.google.com/+yumingxu/posts/1zH9kf6ddXD

 

A Quiet Winter 《沉默的冬天》, tr. Nicholas Richards

http://www.theworldofchinese.com/2015/10/a-quiet-winter-part-1/

http://www.theworldofchinese.com/2015/10/a-quiet-winter-part-2/

 

Essais

 

- One Day, One of the Screws Will Come Loose 《我相信会有一颗松掉的螺丝钉》

Tr. Luisetta Mudie, avec introduction de Li Jingrui

https://paper-republic.org/pubs/read/one-of-the-screws-will-come-loose/

Texte chinois http://writingchinese.leeds.ac.uk/translation-competition/the-2nd-bai-meigui-competition-non-fiction/competition-text/

 

- Love, a Decisive Moment 爱情,一个决定性瞬间, tr. Anne Henochowicz

China Digital Times février 2016

http://chinadigitaltimes.net/2016/02/translation-love-a-decisive-moment/

(with link to Chinese original)

 

- Small Town, Li Jingrui looks back on her hometown (un regard rétrospectif sur sa ville natale), tr. Helen Wang for The Los Angeles Review of Books / China Channel, October 2018.

https://chinachannel.org/2018/10/05/small-town/

 

 


[2] Traduction célèbre de Marguerite Yourcenar. Mais la traduction de Jacques Lacarrière a un meilleur rythme :

Quand tu prendras le chemin vers Ithaque

Souhaite que dure le voyage,

Qu'il soit plein d'aventures et plein d'enseignements.

[4] Texte chinois : http://writingchinese.leeds.ac.uk/translation-competition/the-2nd-bai-meigui-competition-non-fiction/competition-text/

Traduit en anglais par Luisetta Mudie, avec introduction de Li Jingrui :One Day, One of the Screws Will Come Loose. A lire en ligne dans la série Read Paper Republic, 16 juin 2016 :

https://paper-republic.org/pubs/read/one-of-the-screws-will-come-loose/

[5] celui de la lecture.

 

 

 

 

 

 

 

 

     

 

 

 

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