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Publication du premier
roman chinois écrit sur microblog
par Brigitte Duzan, 22 août 2011
Les microblogs
étaient surtout, jusqu’ici, l’art de ne rien dire en
très peu de mots, une manière de raconter son quotidien
en mode sms, « a quick and dirty stream of
consciousness » à ses débuts, d’après le pionnier du
blog Jason Kottke.
Le terme
lui-même ne date que de 2005, mais, quand les caractères
se sont substitués aux mots, le concept s’est répandu
comme une traînée de poudre en Chine. La concurrence est
tellement âpre que Baidu (le concurrent de Google) a
annoncé début août qu’il jetait l’éponge et fermait son
site de microblogging, Baidu Talk, lancé en septembre
2010, trop tard pour s’imposer sur un marché déjà dominé
par deux monstres, Weibo (围脖)
et Tencent (腾讯).
C’est justement
sur Weibo (围脖)
qu’a initialement été écrit le premier roman issu de
microblog publié en Chine ; sorti en mars 2011, il est
intitulé « L’amour au temps du microblog »
(《围脖时期的爱情》)(1), comme on disait |
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« L’amour au temps du microblog »
(《围脖时期的爱情》) |
autrefois
l’amour au temps du choléra…
« Si tu souffres tu n’as qu’à pleurer »
(《
痛就哭出声来》) |
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L’auteur
s’appelle Wen Huajian (闻华舰).
Ce n’est pas un novice, il a déjà publié un livre, en
2010, sur les amours contrariées d’un professeur
d’université : « Si tu souffres tu n’as qu’à pleurer » (《
痛就哭出声来》),
ce qui, en Chine, ne se faisait guère jusqu’ici qu’au
cinéma.
Les deux livres
sont sortis en livre de poche, le dernier publié avec
des illustrations, comme pour compenser la pauvreté du
texte. Mais, pour jouer encore sur les mots, cela n’a
guère fait qu’une microvague (weibo
微波) :
les ventes n’ont pas décollé. On peut se demander si
Stendhal aurait inventé la cristallisation des
sentiments en écrivant Madame Bovary sur internet.
Pourtant, la
littérature sur internet est en train d’acquérir ses
lettres de noblesse : le prestigieux et très officiel
prix littéraire Mao Dun (茅盾文学奖),
émanation de l’Union nationale des Ecrivains,
lui a
ouvert ses portes. Deux |
bestsellers internet
étaient initialement en lice pour le prochain prix (2) :
« Mémoires d’un pilleur de tombes » (《盗墓笔记》),
de Nanpai Sanshu (南派三叔),
et « Retour au temps des Ming comme prince du sang » (《回到明朝当王爷》)
de Yue Guan (月关).
Ils n’ont pas passé la
première sélection, mais, dans la liste des 180 œuvres en
compétition, il reste quand même deux romans écrits et publiés
sur internet : « Jours anciens à Bashan » (《巴山旧事》)
de Zhang Shifang (张仕芳),
et « Espionnage au bureau » (《办公室风声》)
de Song Lixuan (宋丽晅).
Notes
(1) Weibo (围脖) est un homonyme du terme chinois pour microblog : weibo
(微博) ;
le second est la traduction littérale de microblog, le premier
signifie quelque chose qu’on porte autour du cou, un foulard par
exemple. Cela protège du froid, mais cela peut aussi étouffer…
(2) Il s’agira du prix
2012, le huitième, les prix étant maintenant décernés tous les
quatre ans.
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